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Plus de 356.000 décès cardiovasculaires par an dans le monde chez les 55-64 ans imputables aux phtalates dans les plastiques

Publié le lundi 16 septembre 2024

Les phtalates présents dans les plastiques sont impliqués dans plus de 356.000 décès cardiovasculaires dans le monde, dont plus de 27.000 en Europe, chez les personnes âgées de 55 à 64 ans, pour la seule année 2018, soit près de 13,5% de la mortalité cardiovasculaire mondiale dans cette tranche d'âge, selon une étude publiée dans le Lancet eBioMedicine.

L'exposition aux polymères synthétiques constituant les plastiques représente un nouveau facteur de risque de maladie cardiovasculaire émergeant depuis une dizaine d'années, avec une inquiétude particulière sur les phtalates, notamment le DEHP, utilisé pour rendre les plastiques plus flexibles. Il est présent non seulement dans les matériaux de construction comme les revêtements de sol, mais aussi des produits domestiques comme les parfums, les rideaux de douche, les tuyaux d'arrosage, les emballages alimentaires, ou encore le matériel médical comme les cathéters, gants, etc.

Des microparticules de plastique ont notamment été retrouvées dans les plaques d'athérome, associées à un risque accru d'infarctus et d'AVC. Une précédente étude avait établi un lien entre les phtalates et plus de 50.000 décès par an, principalement cardiovasculaires, aux Etats-Unis chez les plus âgés. Sara Hyman de la New York University Grossman School of Medicine à New York et ses collègues ont cette fois voulu réaliser une estimation mondiale des décès cardiovasculaires imputables aux plastiques.

Ils se sont appuyés, pour leurs calculs, sur les données de mortalité cardiovasculaire de l'Institute for Health Metrics and Evaluation (IHME) et les estimations d'exposition au DEHP régionales provenant de plusieurs sources, pour 200 pays et territoires. Les estimations portent sur l'année 2018 et les personnes de 55 à 64 ans. Ils ont ainsi estimé qu'en 2018, 356.238 décès cardiovasculaires dans cette tranche d'âge à travers le monde étaient attribuables à l'exposition au DEHP. Cela représente 13,5% de l'ensemble des décès cardiovasculaires chez les 55-64 ans, les plastiques étant à l'origine de l'exposition dans 98% des cas, soit de 13,23% de décès cardiovasculaires.

De fortes disparités régionales ont été observées, et 74% de la mortalité cardiovasculaire mondiale liée au DEHP concernait les régions Moyen-Orient/Asie du Sud et Asie de l'Est/Pacifique. Dans ces deux régions, le pourcentage de décès cardiovasculaires liés au DEHP était respectivement de 16,8% et 13,0%. Le pourcentage de décès cardiovasculaires liés au DEHP le plus élevé concernait la région Moyen-Orient/Asie du Sud, suivie de l'Amérique latine (13,5%), l'Asie de l'Est/Pacifique, le Canada (12,7%), l'Australie (12,1%), l'Afrique (11,8%), puis les Etats-Unis (10,4%) et l'Europe (8,4%). Le nombre de décès cardiovasculaires concernés était de 148.474 en Moyen-Orient/Asie du Sud, de 27.237 en Europe, 10.239 aux Etats-Unis, 801 au Canada et 314 en Australie. En France, 627 décès cardiovasculaires seraient imputables au DEHP en 2018 chez les 55-64 ans. En outre, au sein des régions, il existe aussi des disparités dans l'association entre percentile d'exposition au DEHP et pourcentage de décès attribuable.

La plus forte différence de pourcentage de décès attribuable au DEHP entre le quantile le plus bas et le quantile le plus élevé concerne les Etats-Unis, avec 30,5 points de pourcentage de différence entre le 10e et le 95e percentile, et l'Afrique avec 28,6 points de pourcentage de différence. Le différentiel en Europe est de 18,2 points de pourcentage, tandis qu'il se situe autour de 4-5 points pour les régions Moyen-Orient/Asie du Sud et Asie de l'Est/Pacifique. Dans ces deux dernières régions, les populations les moins exposées au DEHP sont davantage touchées que dans les autres régions.

Ces pays font face à des taux plus élevés d'exposition à ces produits probablement du fait qu'ils connaissent un bond de la production de plastique tout en ayant moins de restrictions liées à la fabrication que d'autres régions, suggèrent les auteurs. "Nos résultats soulignent la nécessité urgente de réglementations globales visant à réduire l'exposition à ces toxines, en particulier dans les régions les plus touchées par l'industrialisation rapide et la consommation de plastique", commente Leonardo Trasande de la New York University Grossman School of Medicine, auteur principal, dans un communiqué de l'institution.

Il précise toutefois que l'étude n'était pas conçue pour établir un lien causal direct entre DEHP et mortalité cardiovasculaire, et souligne que les autres types de phtalates n'ont pas été pris en compte dans le calcul du risque de décès, ni la mortalité dans les autres groupes d'âge. Il est ainsi probable que la mortalité cardiovasculaire liée à ces substances soit plus élevée. Les chercheurs prévoient pour la suite d'analyser l'effet de la réduction de l'exposition aux phtalates sur la mortalité mondiale, et d'élargir leur étude à d'autres de problèmes de santé qui pourraient être affectés, comme les naissances prématurées.

 

(Lancet eBioMedicine, publication en ligne du 28 avril)

 

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