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Le cannabis médical est associé à un risque augmenté, mais faible, d'arythmie chez les patients souffrant de douleurs chroniques
Publié le jeudi 11 janvier 2024
LONDRES, 11 janvier 2024 (APMnews) - Chez les patients souffrant de douleurs chroniques, le recours au cannabis thérapeutique est associé à un risque accru, mais qui reste néanmoins faible, d'arythmie, d'après une étude observationnelle parue jeudi dans l'European Heart Journal.
"Un nombre croissant de pays autorisent les médecins à traiter la douleur chronique avec du cannabis médical. Alors que la consommation récréative de cannabis a été associée à une augmentation du risque cardiovasculaire, il est important de mieux étudier la sécurité du cannabis médical", considèrent Anders Holt de l'hôpital universitaire de Copenhague au Danemark et ses collègues. "A notre connaissance, il s'agit de la première et unique étude examinant ces associations avec des données contemporaines."
Dans un éditorial associé, Robert Page de l'université du Colorado aux Etats-Unis, indique également: "La pharmacovigilance étroite du cannabis, ainsi que sa sécurité et son efficacité, ont été limitées par des décennies d'illégalité mondiale. Néanmoins, avec l'augmentation de la décriminalisation et de la légalisation du cannabis à travers le monde, l'association entre l'exposition au cannabis et les événements cardiovasculaires incidents est apparue comme un signal de sécurité important."
Les chercheurs danois se sont appuyés sur des registres nationaux incluant les données de 1,88 million de patients souffrant de douleurs chroniques (46% de douleurs musculosquelettiques, 13% de douleurs neurologiques, 11% de cancer et 30% de douleurs d'origine non précisée).
Ils ont comparé 5.391 patients, d'âge médian de 59 ans, ayant commencé un premier traitement par cannabis médical entre 2018 et 2021, à 26.941 patients témoins appariés en termes de diagnostic de douleur chronique, d'âge, de sexe et de recours à d'autres analgésiques.
Les patients traités par cannabis médical étaient 47% à avoir recours uniquement au tétrahydrocannabinol (THC), 24% uniquement au cannabidiol (CBD) et 29% à un mélange des deux.
Une surveillance améliorée des patients à risque recommandée
Au cours d'un suivi de 180 jours après le début du traitement, une arythmie incidente a été observée chez 0,8% des patients traités par cannabis médical. Dans 76% des cas, il s'agissait d'une fibrillation atriale/flutter atrial, dans 12% des cas d'une tachycardie paroxystique et dans 12% des cas d'un autre type d'arythmie.
Parmi les individus témoins, 0,4% ont développé une arythmie, dont 79% de fibrillation atriale/flutter, 14% de troubles de la conduction et 7% d'autres arythmies.
La consommation de cannabis médical était ainsi associée à un risque multiplié par deux d'arythmie à 180 jours par rapport à l'absence de consommation, avec un risque relatif de 2,07. A un an de suivi, le risque relatif était moindre (1,36).
"Les patients atteints d'une maladie cardiométabolique connue et ceux atteints d'un cancer étaient les sous-groupes associés aux différences de risque absolu les plus élevées, ce qui pourrait refléter une susceptibilité élevée aux effets secondaires de la consommation de cannabis médical", indiquent les auteurs.
Parmi les patients atteints d'une maladie cardiométabolique, le risque absolu d'arythmie à 180 jours était de 1,6% chez les patients exposés au cannabis contre 0,8% chez les individus témoins et parmi les patients atteints de cancer, le risque absolu était respectivement de 1,5% contre 0,4%.
Aucune association significative n'a en revanche été retrouvée entre la consommation de cannabis médical et le risque de syndrome coronarien aigu à 180 jours.
"L'absence apparente d'association entre la consommation de cannabis médical et le risque de syndrome coronarien aigu, d'accident vasculaire cérébral et d'insuffisance cardiaque pourrait indiquer que l'effet à court terme de la consommation de cannabis médical est principalement associé à des altérations du système de la conduction cardiaque ou à une cardiomyopathie atriale", commentent les auteurs.
Ce travail ne doit toutefois pas "inciter les patients souffrant de douleurs chroniques à s'abstenir d'essayer le cannabis médical si les autres traitements s'avèrent inadéquats", estime Anders Holt dans un communiqué. "Cependant, ces résultats suggèrent qu'une surveillance améliorée pourrait être recommandée, en particulier chez les patients qui présentent déjà un risque accru de maladie cardiovasculaire."
Des travaux complémentaires sont nécessaires pour mieux comprendre le lien entre cannabis et risque cardiovasculaire, notamment pour vérifier que ces résultats sont similaires dans d'autres pays et d'autres contextes.
"Il serait également intéressant de comprendre s'il existe des liens entre la consommation à long terme de cannabis et l'insuffisance cardiaque, les accidents vasculaires cérébraux ou le syndrome coronarien aigu. Ce serait important de le clarifier puisque la douleur chronique peut persister pendant de nombreuses années", note Anders Holt.
"Sur le plan thérapeutique, ces résultats suggèrent que le cannabis médical n'est peut-être pas une option thérapeutique 'universelle' et devrait être contextualisé en fonction des comorbidités des patients et de leur vulnérabilité potentielle aux effets secondaires", estime Robert Page.
(European Heart Journal, publication en ligne du 11 janvier, et éditorial associé)
Source: APMnews
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