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NATURE-PARADOX : le cumul du LDL-c

Publié le mercredi 11 octobre 2023

François Schiele

Pr François Schiele
Cardiologie et maladies vasculaires
Hôpital Jean-Minjoz
CHU Besançon

Comme les lipoprotéines contenant une ApoB (et donc le LDL-c qui en représente la majeure composante) sont causales de l’athérosclérose, le développement et les complications sont liées à la fois au niveau plasmatique du LDL-c et à la durée d’exposition. Cette hypothèse est à la base de la notion de cumul du LDL-c qui, exprimé en « gramme/L-années » permet de mieux estimer l’impact qu’une valeur à un moment donné dans la vie. Comme pour le tabagisme exprimé en « paquet-années ». Intuitivement, le concept semble correct, ainsi que l’idée qui en découle d’un seuil d’exposition maximal à ne pas dépasser au cours de la vie afin de ne pas risque le développement et les complications de l’athérosclérose. Mais, si des études observationnelles vont dans ce sens, le concept reste incomplètement validé.

NATURE-PARADOX: Naturally Randomized Trial of Titrating Cumulative Exposure to LDL to Solve the Prevention Paradox. Penchons-nous sur cette étude présentée par Brian Ference en Session Late Breaking Trials.

Le but était de déterminer si l’estimation du risque par la valeur de l’exposition cumulée au LDL-c peut remplacer celle obtenue par l’âge et le niveau moyen du LD-c en prévention primaire. Pour faire cette démonstration, les auteurs ont utilisé les données de 424 252 individus en prévention primaire et sans traitement hypolipémiant de la UK Biobank, suivis au long cours et représentant 17 025 506 personnes-années (28 914 individus ont eu un événement cardiovasculaire majeur).

Ils ont comparé l’estimation du risque donné par le cumul du LDL-c à celui estimé par la valeur du LDL-c et l’âge, en faisant l’hypothèse que tous les individus (en fonction de leur sexe) ont une évolution comparable du LDL-c au cours de la vie et que les risques restent proportionnels. Le niveau du LDL-c à 58 ans (âge médian à l’inclusion des individus à leur inclusion dans UK Biobank) ainsi que le cumul du LDL-c ont été estimés en fonction d’une seule valeur du LDL-c et du profil génétique sur 100 variants génétiques influant sur le LDL-c et l’ApoB. Les patients ont été divisés en 3 groupes : groupe avec un LDL-c élevé (médian de 1.54g/L), un LDL-c moyen (médiane 1.43g/L) et  un LDL-c bas (médiane 1.26g/L).

Les trois groupes étaient comparables en tout point, effet de la randomisation mendélienne, mais les courbes cumulées d’événements montrent que le risque est proportionnel à l’âge et au niveau du LDL-c avec un sur risque 27% entre le groupe avec LDL-c élevé par rapport à group LDL-c moyen de sur risque de 68% entre LDL-c haut et bas (figure 2, côté gauche).

Si on regarde ces mêmes trois groupes en fonction de leur cumul de LDL-c, ni l’âge ni le niveau de LDL-c n’interviennent et le risque donné par le seul cumul du LDL-c (figure 1, côté droit).

En pratique, quand le cumul atteint 210 mmol/L-année (soit 84 grammes/L-année) le risque cardiovasculaire est de 10% par an et (bien sûr) ce niveau de risque est atteint plus tôt si le LDL-c est élevé (figure 1, côté gauche, flèche bleue). Des analyses complémentaires montrent que ce risque de 10%/an est atteint pour un cumul de LDL-c plus faible en cas de diabète (160 mmol/L-année, soit 64 grammes-année) ou de tabagisme (190mmol/L-année, soit 75 grammes/L-année) (figure 2).

Figure 1 - L’estimation du risque cardiovasculaire par la valeur du cumul du LDL-c remplace celle du niveau de LDL-c et de l’âge (d’après la présentation de B. Ference, Nature – Paradox, ESC 2023)

Figure 1 - L’estimation du risque cardiovasculaire par la valeur du cumul du LDL-c remplace celle du niveau de LDL-c et de l’âge (d’après la présentation de B. Ference, Nature – Paradox, ESC 2023)

Figure 2 - En cas de diabète, un risque cardiovasculaire de 10% à 1 an est atteint pour un cumul de LDL-c de 160 mmol/L-année (soit 64 grammes-année) ou de 190mmol/L-année, (soit 75 grammes/L-année) en cas de tabagisme (d’après la présentation de B. Ference, Nature–Paradox, ESC 2023)

Figure 2 - En cas de diabète, un risque cardiovasculaire de 10% à 1 an est atteint pour un cumul de LDL-c de 160 mmol/L-année (soit 64 grammes-année) ou de 190mmol/L-année, (soit 75 grammes/L-année) en cas de tabagisme (d’après la présentation de B. Ference, Nature–Paradox, ESC 2023)

On peut discuter de l’intérêt pratique du cumul du LDL-c et douter des valeurs seuil observées dans l’étude NATURE-PARADOX. Mais cette valeur de cumul permet de faire comprendre l’intérêt de la prévention primaire et combien l’abaissement du niveau du LDL-c permet de reculer l’âge du premier événement cardiovasculaire. Aux patients de choisir l’âge auquel ils souhaitent avoir leur premier infarctus ou AVC.

Retrouvez l'intégralité du dossier spécial "Actualités des lipides à l'ESC 2023"

 

 

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