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Étude HELP-MI : intérêt du dépistage d’Helicobacter Pylori après infarctus
En direct du congrès de l'ESC 2025
Publié le lundi 1 septembre 2025
Messages clés
- L’infection à H. pylori est fréquente (23%) chez les patients avec une pathologie cardiovasculaire et augmente le risque d’hémorragie digestive haute.
- Dans l’étude HELP-MI, malgré 18 466 patients inclus, aucun bénéfice significatif du dépistage systématique sur le risque d’hémorragie digestive n’a été observé.
- Des signaux positifs émergent néanmoins chez les patients avec anémie, suggérant un intérêt dans certains sous-groupes à risque.
Le chiffre à retenir
23.6% : c’est la prévalence d’infection à H.Pylori chez les patients avec infarctus du myocarde.
Méthodologie et résultats
HELP-MI SWEDEHEART(1) est un essai base sur un register, en ouvert, randomisé avec crossover, conduit dans 35 hôpitaux suédois. Les centres alternaient entre une année avec dépistage systématique de H. pylori par test respiratoire à l’urée et une année de dépistage standard, avec wash out de 2 mois entre les deux. Un suivi complémentaire d’environ 1 an a été assuré via les registres nationaux (durée totale jusqu’à 3 ans). Le critère de jugement principal était la survenue d’hémorragies gastro-intestinales hautes (HDH). Les critères secondaires incluaient mortalité toutes causes, décès cardiovasculaire, réadmission pour nouvelle IDM, AVC ou insuffisance cardiaque, en composite et séparément.
Parmi les 9 245 patients inclus dans le groupe dépistage (âge médian de 71 ans, 29% de femmes), 6 480 (70 %) ont effectivement réalisé le test, dont 23,6 % se sont révélés positifs. Au suivi, 299 patients du groupe dépistage (4,1 % à 3 ans) et 336 du groupe soins habituels (4,6 % à 3 ans) ont présenté une HDH, sans différence significative (RR 0,90 ; IC95 % 0,77–1,05 ; p=0,18). Aucun des critères secondaires n’a montré de bénéfice du dépistage. En termes de sécurité ou d’événements ischémiques, les auteurs n’ont rapporté ni excès d’effets indésirables ni différences majeures entre groupes.
Plusieurs limites doivent être soulignées : seulement 70 % des patients du bras dépistage ont effectivement été testés, réduisant l’adhérence à l’intervention, et plus de la moitié des patients des deux bras ont reçu un traitement par IPP à la sortie, rendant la différence d’exposition au risque moins marquée. Ces facteurs ont probablement atténué l’effet potentiel du dépistage. L’analyse per-protocole, avec moins de patients et donc une puissance statistique moindre, montre une tendance non significative en faveur du dépistage systématique.
Figure 1 : hémorragies digestives hautes dans le groupe « screening H.Pylori » et « standard »
Les analyses de sous-groupes ont mis en évidence des signaux positifs chez les patients anémiques à l’admission : réduction du risque d’HDH en cas d’anémie légère (RR 0,64 ; IC95 % 0,42–0,98) et encore plus nette en cas d’anémie modérée à sévère (RR 0,44 ; IC95 % 0,23–0,87). Un bénéfice était également observé chez les patients insuffisants rénaux (RR 0,75 ; IC95 % 0,58–0,97).
Ces éléments, soulignés par les auteurs, amènent à la conclusion dans l’étude que le dépistage systématique n’est pas une stratégie pertinente, bien que la recherche d’H.Pylori pourrait être intéressante pour des sous-populations sélectionnées.
Figure 2 : analyse en sous-groupe du taux d’hémorragie digestive haute
Les résultats de HELP-MI-SWEDEHEART s’inscrivent dans le contexte des recommandations actuelles sur la prévention des saignements sous traitement anti-thrombotique. Les plus récentes guidelines ESC 2023 sur les SCA recommandent désormais l’IPP préventif uniquement chez les patients à risque élevé d’HDH (antécédents d’ulcère, âge avancé, co-médication, éthylisme).(2) Le dépistage systématique d’H. pylori n’est pas formellement préconisé par ces recommandations. En parallèle, les recommandations de Maastricht VI(3) issues du groupe d’étude européen sur H.Pylori, indique que le test et l’éradication d’H. pylori sont recommandés chez les patients à haut risque sous aspirine, et que leur utilité en prévention hémorragique universelle est discutable (NNT élevé). L’essai HEAT (Lancet 2022) en prévention primaire chez des patients traités par aspirine low-dose a montré une réduction significative des saignements ulcéreux à 2,5 ans avec éradication (HR≈0,35, p=0,028), mais cet effet s’est estompé sur le long terme(4).
Références
D’après la présentation du Professor R. Hofmann « HELP-MI SWEDEHEART – Randomised H. pylori screening after MI”, HOTLINE 9.
Conclusion
Dans l’essai HELP-MI-SWEDEHEART, le dépistage systématique d’H. pylori chez des patients avec infarctus du myocarde n’a pas permis de diminuer le risque d’hémorragie digestive. Il pourrait exister un bénéfice dans certains sous-groupes à risque, en particulier les patients avec anémie. Les recommandations européennes privilégient le maintien d’une prévention large par IPP chez les patients à risque, et suggèrent de cibler la recherche d’H. pylori plutôt que de l’utiliser en routine.
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