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L'Académie de médecine invite les rythmologues à se former mieux et plus vite à la maîtrise de l'intelligence artificielle

Publié le mardi 10 octobre 2023

APM news

PARIS, 6 octobre 2023 (APMnews) - Les applications de l'intelligence artificielle (IA) deviennent incontournables en cardiologie, en particulier dans le domaine de la rythmologie, ce qui rend nécessaire d'y préparer les médecins, considère l'Académie de médecine dans un rapport rendu public jeudi, comportant plusieurs propositions dans ce sens.

Les applications de l'IA en santé sont plus particulièrement connues en cancérologie et radiologie, mais la rythmologie "mérite une attention particulière" également, puisque les "signaux électriques cardiaques sont enregistrés sous forme numérique, en clinique et par les nombreux objets connectés diffusés dans la population, ce qui génère un important potentiel d'application de l'IA", note l'académie.

Les outils d'intervention en rythmologie, les registres de la mort subite et les dispositifs médicaux connectés représentent trois sources à partir desquelles l'activité électrique myocardique recueillie sous forme numérique peut être analysée par IA.

Des start-up, dont plusieurs françaises, ont développé des applications de l'IA dans l'ablation de la fibrillation atriale et la prévention des troubles du rythme post-infarctus.

L'IA permet, à partir des électrogrammes intracardiaques, de les classer et, en fonction de leurs caractéristiques, d'identifier les zones de rotors ou de fibrose arythmogène, à l'origine de l'arythmie, et de réaliser une ablation de la fibrillation atriale de meilleure qualité.

En outre, la création, à partir de données d'imagerie, d'une chambre ventriculaire virtuelle personnalisée, permet à l'IA de guider l'ablation de la tachycardie ventriculaire et d'évaluer le pronostic.

Lors des morts subites cardiaques, "c'est moins l'analyse des données de l'activité électrique myocardique et de la délivrance du choc électrique salvateur que celle des données de santé de la population dans son ensemble, qui pourraient contribuer à identifier les meilleurs prédicteurs de risque", note l'académie.

Ainsi, une étude française utilisant l'analyse par l'IA des données de santé de 350.000 personnes non porteuses de pathologie cardiaque reconnue, pour examiner les données non cardiologiques liées au risque de mort subite cardiaque, a abouti à retenir 10.000 variables sur 14 années, soit plus de 300 millions de données du Système national des données de santé (SNDS).

"Les premières analyses révèlent une très grande hétérogénéité des situations, mais les variables non cardiovasculaires semblent donner les meilleurs résultats de prédiction des morts subites. Il semble possible d'identifier la population qui a une probabilité à 90% de faire une mort subite dans l'année. Il serait également possible de prédire le risque individualisé de mort subite et d'en faire la prévention. Ces premiers résultats prometteurs, mais non encore publiés, restent à valider", rapporte l'académie.

Par ailleurs, "les données recueillies lors d'examens électrocardiographiques banals ou par les objets portables, dont les 'montres connectées', permettent grâce à l'IA de prédire la survenue ultérieure ou la récidive de troubles du rythme".

L'intelligence artificielle "est aussi omniprésente dans l'analyse de l'électrocardiogramme en rythme sinusal permettant d'en tirer des conclusions dépassant largement son utilisation habituelle".

L'utilisation de ces données ne va pas sans soulever des problèmes éthiques et juridiques qui ne sont pas encore complètement réglés, estime l'académie.

"L'appropriation en rythmologie cardiaque de l'outil nouveau qu'est l'IA suggère aux médecins rythmologues d'approfondir leurs connaissances mathématiques et d'intégrer les propositions des apprentissages automatiques et profonds dans leur démarche diagnostique et thérapeutique", suggère-t-elle.

L'académie fait ainsi trois propositions :

  1. IA et rythmologie : soutenir le développement de banques de données médicales massives françaises permettant leur traitement avec l'IA par des chercheurs académiques et industriels autour de projets contractuels d'intérêt mutuel. Pour les rythmologues, disposer d'une banque nationale d'électrocardiogrammes permettrait de réaliser des études notamment en utilisant l'IA.
  2. Former les médecins rythmologues à la maîtrise de l'IA : afin de les préparer aux applications devenant incontournables de l'IA en cardiologie et leur permettre l'accès aux bases de données numériques, il paraît justifié:
    • d'intensifier la formation initiale et continue en IA appliquée à la santé en proposant un complément de formation aux médecins, mais aussi aux ingénieurs, dans des parcours fortement multidisciplinaires, associant cliniciens et chercheurs
    • de renforcer le niveau mathématique et informatique des médecins rythmologues, idéalement en favorisant le contact et des travaux communs avec un doctorant en mathématiques et informatique
    • de favoriser l'explicabilité des processus de l'IA qui est un élément majeur de l'appropriation par les médecins des résultats de l'IA. La vérification des propositions issues de l'IA, la création de procédures certifiées et le maintien d'une supervision médicale y contribueront.
  3. Solidifier les aspects éthiques et juridiques le l'IA notamment en cardiologie : leur indétermination et fractionnement actuels doivent être réduits afin d'aider au développement de la recherche et des mises sur le marché. Les relations entre les instituts de recherche et l'industrie nécessaires au progrès doivent être éclairées et encouragées.

Le rapport de l'Académie de médecine

Source: APMnews

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