Un angor hors du commun !

Mis à jour le vendredi 9 juin 2023
dans
Erwan Donal

Erwan Donal
Cardiologue
CHU de Rennes,
Université de Rennes

Imagerie cardiaque : cas clinique en direct du CHU de Rennes

Université de Rennes
CHU de Rennes

L'imagerie cardiovasculaire multimodale suscite votre intérêt ?

Étudiez, étape par étape, le cas d'un patient de 75 ans, actif mais plus fatigué dernièrement, sous AOD à dose curative à cause d'une récidive, il y a 5 ans, de FA ablatée, qui consulte aux urgences du CHU de Rennes pour asthénie et paresthésies des extrémités...

Prononcez-vous avant de découvrir son diagnostic final !

Contexte clinique

Un Homme de 75 ans consulte pour asthénie et paresthésies des extrémités.

le patient est actif, mais plus fatigué ces derniers temps.

Il a un antécédent de fibrillation atriale ancienne, ablatée, mais ayant récidivée il y a 5 ans.

Il prend juste un AOD à dose curative.

Cliniquement :

  • PA 110/80, 75/min
  • Souffle systolique 2-3/6
  • Petits oedèmes péri-malléoloaires
  • Maladie de Dupuytren
  • Rupture du tendon du long biceps

 

Main paralysee

Fibrillation atriale et pseudo-onde Q de nécrose

Echocardiographie

  • Hypertrophie biventriculaire, hypertrophie du septum inter-atrial
  • Hypertrophie concentrique du ventricule gauche

Biologie

Troponine élevée, NT proBNP à 4500 pg/ml ; fonction rénale normale, numération normale, TSH normale, bilan hépatique normal, électrophorèse et immuno-élèctrophorèse des protéines normales, pas de protéinurie.

Powered by Quiz Maker
Diagnostic final

La bonne réponse était... une scintigraphie osseuse !

Revenons sur l'échocardiographie

  • Altération majeure de e’ et s’ septal et latéral
  • Profil diastolique idéalement de type trouble de relaxation mais souvent, diagnostic tardif avec un profil restrictif, voire une fusion de E et A
  • Hypertrophie concentrique du ventricule gauche
  • Toujours optimiser les vues apicales 4, 3 et 2 cavités en veillant à ne pas tronquer l’apex (descendre d’un espace intercostal et faire le strain +++ Aspect en cocarde NON pathognomonique mais ÉVOCATEUR, et justifiant de pousser les investigations

Strain en cocarde avec préservation de l’apex et altération des déformations des segments basaux et moyens. Pronostic sombre si < |10|%

 

  • Hypertrophie biventriculaire
  • Oreillettes larges, mais pas TRÈS larges ; par contre, dysfonction qui peut être appréciée par le strain de l’oreillette gauche (fonction réservoir souvent < 20 %)
  • Valve aortique épaissie, un peu calcifiée
  • Volume d’éjection systolique < 35 ml/m² et gradient moyen < 30 mm Hg, surface calculée < 1 cm²
  • Souvent, de petites régurgitations mitrales et tricuspides sont observées aussi dans l’amylose, sur des valves un peu épaisses

 

European Heart Journal (2021) 42, 1554–1568

 

Scintigraphie osseuse du corps en entier

 

Que penser de la sténose aortique ?

Echo Dobu de viabilité, à la recherche d’une pseudo-sténose

Rechercher à augmenter le volume d’éjection systolique sous faibles doses de dobutamine pour voir si la sténose est sévère quand le début tend à se normaliser

Score calcique valvulaire mais qui peut être faussement rassurant en cas d’amylose car épaississement ; infiltration plus que calcification des feuillets valvulaires

 

  • ETO : vue de la valve aortique, peu calcifiée, mais dont l’ouverture systolique est < 1 cm²
  • Attention : haut risque thrombo-embolique -> contraste spontané et thrombus de l’auricule gauche, bien qu’anti-coagulé efficacement
  • Hypertrophie du septum inter-atrial

 

 

Que penser de la sténose aortique ?

C’est fréquent dans l'amylose : l’infiltration de l’endocarde, comme celle du myocarde, entraîne un épaississement des feuillets valvulaires et des valvulopathies, pas forcément très sévère, mais fréquent.

Faut-il faire une IRM cardiaque ?

Ne pas retarder la prise en charge.

IRM du cœur : indispensable pour l’amylose AL, pas pour la TTR.

Faut-il faire une génétique ?

OUI, si le patient est d’accord pour donner son consentement.

  • Arbre généalogique
  • Initier une éducation vis-à-vis de la maladie et ses formes
  • Génotypage ciblé amylose TTR
  • Bien rechercher les atteintes extracardiaques avec l’aide :
    • du neurologue,
    • du rhumatologue ou gastro-entérologue
    • penser aux atteintes ophtalmologiques

Évaluer simplement le pronostic

  • “Staging system” avec deux biomarqueurs : cut-offs of 3000 ng/L pour NT-proBNP & 45 ml/min/1.73 m2 pour eGFR
  • Stage I = NT-proBNP ≤ au cut-off & eGFR ≥ cut-off
  • Stage III = NT-proBNP > cut-off & eGFR < cut-off
  • Les autres définissent le “Stage II

Après la génétique, et la confirmation du diagnostic d’amylose TTR = centre expert

Il faudra quelques semaines pour avoir le résultat du génotypage et donc savoir :

  • si l’amylose est « sauvage »: pas de dépistage familial
  • si l’amylose est « mutée » (génétique) : importance de proposer un dépistage du variant pathogène chez les apparentés, dépistage de patients asymptomatiques
  • prise en charge génétique spécialisée +++

Le traitement = surveillance cardiologique / 6 mois

  • Proscrire les béta-bloquants
  • Attention aux hypotensions orthostatiques
  • Attention au risque thrombo-embolique
  • Traitements spécifiques
  • Attention aux troubles conductifs : surveillance ECG / 6mois => indication à stimulation cardiaque fréquente, avec un objectif de fréquence cardiaque à 80/min

Faut-il accompagner les patients et leur famille ?

 

Les réflexes à adopter en cas d'amylose TTR

European Heart Journal (2021) 42, 1554–1568

Ce cas clinique vous est proposé avec le soutien institutionnel de GE Healthcare et Pfizer

GE Healthcare
Pfizer

 

Imagerie
Cas précédent

Beaucoup trop jeune pour mourir…

Cas suivant

Imagerie diagnostique de l’amylose cardiaque, une échographie évocatrice ?

0 commentaire — Identifiez-vous pour laisser un commentaire