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Un chromosome X transmis par le père ?
Publié le mardi 9 juillet 2024
Imagerie cardiaque : cas clinique CHU Rangueil, Toulouse
Patient de 51 ans, d’origine portugaise, porteur d’une CMH obstructive symptomatique.
Son père est connu pour une maladie de Fabry, sa sœur est porteuse du gène, sans expression phénotypique.
Il n’a pas d’autre antécédent notable, en dehors d’un tabagisme.
Présentation du cas
Contexte clinique
- Vu pour la première fois en consultation pour bilan d’hypertrophie ventriculaire gauche en septembre 2022
- À cette date, le patient présente une dyspnée d’effort invalidante, associée à des manifestations d’angor, parfois prolongée, avec élévation de troponine
- La dernière exploration angiocoronarographique était normale
Il apporte les résultats de sa prise de sang :
- NFS normale
- DFG estimé 120 mL/mn/m2, sans anomalie hydroélectrolytique
- NT pro BNP élevé à 4300 pg/ml
- Troponine hs 330 ng/L
ECG
- Rythme sinusal
- Complexes prématurés occasionnels
- PR normal
- QRS larges
- HVG électrique
- Ondes T négatives en inférieur et inféro latéral
Figure 1 : électrocardiogramme
ETT
À l’échocardiographie :
- FEVG préservée
- Hypertrophie ventriculaire gauche à prédominance apicale et septale, avec septum mesuré à 20 mm
- Obstruction dans la chambre de chasse, estimée à 80 mmHg au repos
- Diamètre antéro-postérieur de I'oreillette gauche mesuré à 53 mm
- Fonction VD préservée, absence de valvulopathie
Vidéo 1
Vidéo 2
Vidéo 3
ETT - Effort
Figure 2
Vidéo 4
IRM
- FEVG à 52 %, VTD VG 127 ml/m² ; FEVD à 52 %, avec VTD VD à 108 ml/m²
- Défaut de clairance méso et endomyocardique des segments apical, latéral, inférieur, et inféro latéral
- T1 natif myocardique abaissé (950 ms)
- Flux d'accélération sous-aortique et SAM avec fuite mitrale excentrée
- Masse myocardique estimée à 159 g par m²
- Épaississement myocardique symétrique mesuré au maximum sur le bourrelet septal à 20 mm
Figure 3
Figure 4
Vidéo 5
Diagnostic final
Les résultats de l’enquête biologique nous parviennent :
- L'immuno-fixation des protéines sériques retrouve seulement une augmentation polyclonale des IGA sans anomalie monoclonale
- Le dosage des chaines légères libres sériques et urinaires est normal
- IFU normale
- Le dosage de l'activité alphagalactosidase revient effondré, le tout étant évocateur d'une très probable maladie de Fabry
Le patient est donc adressé au CHU pour enquête génétique, et bilan spécifique en médecine interne…
L’enquête génétique retrouve un variant pathogène p.Phe113Leu du gène GLA.
Ce variant est associé à des manifestations cardiaques potentiellement sévères, et notamment des manifestations d’ischémie myocardique sans atteinte coronarienne ce qui a été le cas de notre patient.
Traitement et gestion réels du cas
Il bénéficiera d’une alcoolisation septale, permettant un bon résultat hémodynamique et une amélioration des symptômes.
Seront finalement associées :
- Une atteinte rénale liée à la maladie de Fabry, apparue secondairement (atteinte glomérulaire avec croissants cellulaires, podocytes avec large cytoplasme vacuolisé)
- Une IRM cérébrale, retrouvant une lacune cérébelleuse droite
- Une enzymothérapie substitutive doit être initiée à la rentrée 2024
Figure 5
Discussion
Nous soulignons ici l’errance diagnostique initiale de ce patient, sur maladie de Fabry peu probable car liée à l’X. Il était suivi depuis quelques années pour une « simple » CMH qui a finalement été bilantée par un cardiologue remplaçant.
Le variant du gène HLA p.Phe113Leu est le plus fréquemment rapporté chez les sujets portugais porteurs d’une maladie de Fabry.
Conclusion
La maladie de Fabry est une maladie rare, mais probablement sous estimée car sous-diagnostiquée.
Le bilan d’une hypertrophie ventriculaire gauche chez un homme d’âge compatible doit systématiquement comporter un dosage de l’alpha galactosidase.
Dans certaines populations (Portugaises), l’incidence du variant pathogène HLA p.Phe113Leu est élevée, variant associé à des atteintes cardiaques parfois exclusives, tardives, et sévères.
Notre sujet d’origine portugaise illustre bien cette théorie, avec deux parents porteurs de cette même mutation bien que l’incidence de la maladie soit théoriquement d’un sujet sur 15 000.
Ce cas ne représente pas l’opinion de la SFC ni de Cardio-online, et n’engage pas leur responsabilité
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