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Le risque de cancer du poumon augmente de 14% avec les IEC par rapport aux ARA II
Publié le mardi 30 octobre 2018
LONDRES, 26 octobre 2018 (APMnews) - Les inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (IEC) semblent associés à une augmentation de 14% du risque de cancer du poumon par rapport aux antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II (ARA II), risque qui augmente avec la durée d'utilisation de ces antihypertenseurs, selon une étude publiée dans le British Medical Journal (BMJ) jeudi.
Jusqu'à présent, les données sur le sujet étaient contradictoires. En 2010, une méta-analyse réalisée par des chercheurs américains avait montré une élévation significative de cancer du poumon avec les ARA II tandis qu'une large étude danoise avait démontré que ces médicaments n'étaient pas associés à un risque significativement accru de cancer en général, par rapport aux IEC. Par ailleurs, une étude américaine datant de 2015 avait suggéré que les IEC pourraient augmenter le risque de développer un mélanome, mais pas les ARA II.
En se basant sur des données biologiques qui suggèrent que le risque de cancer du poumon serait accru par les IEC en raison de l'accumulation de bradykinine et de la substance P dans les poumons, Blanaid Hicks du Lady Davis Institute, Jewish General Hospital de Montréal et ses collègues ont voulu déterminer si l'utilisation d'IEC était réellement associée à un risque accru de cancer du poumon, par rapport aux ARA II.
Leur étude de cohorte a inclus 992.061 patients chez qui un traitement antihypertenseur avait récemment été instauré.
Durant un suivi moyen de 6,4 ans, ils ont recensé 7.952 événements relatifs à un cancer du poumon, ce qui correspond à une incidence brute de 1,3 pour 1.000 personnes-années.
Globalement, l’utilisation d’IEC a été associée à une augmentation du risque cancer du poumon de 14% par rapport à l'utilisation d'ARA II. Ce risque augmentait graduellement avec la durée d'utilisation du traitement, avec une association évidente après 5 ans (+22%) et un pic (+31%) après plus de 10 ans d'utilisation.
Concernant les autres classes d'antihypertenseurs, les chercheurs font seulement une comparaison avec les diurétiques thiazidiques : par rapport à ces derniers, les IEC augmentaient de 6% le risque de cancer du poumon (mais de 23% avec plus de 10 ans de traitement), et les ARAII ne modifiaient pas le risque par rapport aux thiazides.
« L'association entre les IEC et le cancer du poumon est biologiquement plausible. En plus de l'angiotensine I, l'enzyme de conversion de l'angiotensine métabolise également la bradykinine, un vasodilatateur actif qui s'accumule au niveau pulmonaire. Or, les récepteurs de la bradykinine ont été localisés sur divers tissus cancéreux, notamment au niveau du poumon, et la bradykinine peut stimuler directement la croissance de ce cancer », expliquent les chercheurs.
« Il a été démontré que la bradykinine stimule la libération du facteur de croissance endothélial vasculaire [VEGF], favorisant ainsi l’angiogénèse et ayant des effets indirects sur le cancer du poumon en augmentant la perméabilité vasculaire, via l’activation de la métalloprotéinase matricielle, facilitant l’invasion tumorale et les métastases », ajoutent-ils.
En outre, l'utilisation des IEC entraîne également une accumulation de substance P, qui est exprimée dans les tissus cancéreux du poumon et qui est associée à la prolifération tumorale et à l'angiogenèse.
Les chercheurs estiment par ailleurs que les résultats de leur étude soulèvent des questions importantes quant à l'association sacubitril + valsartan (Entresto, Novartis) qui combine un inhibiteur de la néprilysine à un ARA II. « L'inhibition de la néprilysine entraîne une augmentation des peptides vaso-actifs et d'autres peptides, notamment la bradykinine et la substance P », commentent-ils.
Ils s'interrogent également sur les récentes données qui suggèrent que les IEC pourraient protéger contre la pneumopathie radio-induite chez les patients atteints de cancer du poumon.
Dans un éditorial accompagnant l'article, Deirdre Cronin-Fenton de l'université d'Aarhus (Danemark) souligne que « sur le plan critique, étant donné que différents IEC ont des propriétés pharmacologiques et des effets pléiotropes variables, il reste à déterminer si un IEC particulier a été à l'origine des associations observées ».
(BMJ, publication en ligne du 24 octobre)
Source : APM International
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