Consensus d’experts français sur la dénervation rénale endovasculaire comme thérapeutique additionnelle dans l’HTA de l’adulte en 2024

Publié le mardi 24 septembre 2024

De 2017 à 2024, 7 essais randomisés, contrôlés contre une intervention fictive (sham), de bonne qualité méthodologique, ont apporté de façon concordante la preuve de l'efficacité tensionnelle et de la sécurité de la dénervation rénale (DR) par voie endovasculaire utilisant comme méthode d’ablation des efférences et afférences sympathiques à destinée rénale, la radiofréquence, les ultrasons focalisés ou l'éthanol.  

Sur la base de ces résultats, la FDA et la HAS ont approuvé en 2023 et 2024 l’utilisation de la DR par radiofréquence et ultrasons comme thérapeutique additionnelle dans la prise en charge de l’hypertension artérielle (HTA).

Après la publication du consensus d’experts internationaux et les recommandations de la Société Européenne d’HTA de 2023, le groupe d'experts de la SFHTA, de la SFC et d’autres sociétés savantes (voir liste ci-dessous) ont publié en septembre 2024 le nouveau consensus français sur l'utilisation appropriée de la DR dans la prise en charge de l'HTA de l’adulte (> 18 ans) ainsi qu'un parcours de soins dédiés. 

Les indications

Sur la base des résultats des différentes études, la DR par radiofréquence ou ultrasons peut être proposée comme thérapeutique additionnelle pour :

1. Les patients ayant une HTA résistante au traitement non contrôlée :

  • Définie comme une pression artérielle (PA) clinique en position assise ≥ 140 mmHg et/ou ≥ 90 mmHg, confirmée par une mesure ambulatoire sur 24 heures avec une PA systolique diurne ≥ 135 mmHg, ou une PA systolique sur 24 heures ≥ 130 mmHg, ou une PA en automesure à domicile ≥ 135 mmHg et/ou ≥ 85 mmHg
  • Malgré un traitement par au moins trois antihypertenseurs, incluant un inhibiteur calcique à action prolongée, un bloqueur du système rénine-angiotensine, et un diurétique thiazidique ou apparenté, administrés à la dose maximale tolérée, idéalement sous forme de combinaison en une seule prise
  • Cette indication est de classe II B selon les recommandations ESH 2023 1

2. Ayant une anatomie des artères rénales compatible avec le geste de DR. Celle-ci doit être évaluée de préférence par un angioscanner des artères rénales afin d’exclure :

  • Des diamètres/longueurs/anatomie inappropriés des artères rénales principales et accessoires selon le cathéter utilisé
  • Une sténose athéroscléreuse de l'artère rénale ≥ 30 %
  • Une dysplasie fibromusculaire (DFM) des artères rénales, quel que soit le degré de sténose
  • Un rein fonctionnel unique ou rein solitaire
  • Un rein transplanté
  • Des calcifications étendues de l’aorte abdominale et des artères rénales

3. Ayant un débit de filtration glomérulaire estimé ≥40 ml/min/1,73 m2
4. Après exclusion des formes secondaires d’HTA, en particulier l’hyperaldostéronisme primaire
5. Après avoir informé le patient du rapport bénéfice/risque de la DR dans le cadre d'un processus de décision médicale partagée, tenant compte des préférences du patient
6. Après discussion multidisciplinaire avec un centre spécialisé (centre d'excellence ESH ou clinique spécialisée dans la prise en charge de l'HTA)

De plus, la DR peut être envisagée dans d'autres contextes cliniques après une discussion multidisciplinaire.

7. Pour une HTA non contrôlée avec une non-observance sévère au traitement antihypertenseur, (classe II B selon les recommandations ESH 2023).
8. Pour une HTA non contrôlée chez les patients ayant une intolérance aux traitements antihypertenseurs entraînant une altération de la qualité de vie (classe II B selon les recommandations ESH 2023).

Le geste de DR

Une expertise en interventions endovasculaires sur les artères rénales et une formation aux techniques de DR sont nécessaires pour les cardiologues et les radiologues interventionnels réalisant ces procédures, tandis que les centres offrant la DR doivent disposer des ressources nécessaires pour gérer efficacement les éventuelles complications potentielles qui sont rares.

La DR est réalisée sous sédation ou anesthésie générale courte car la procédure est douloureuse. Une consultation pré-anesthésique doit donc être organisée.

Les traitements anticoagulants peuvent être temporairement suspendus en fonction du risque/bénéfice individuel afin de limiter les complications hémorragiques liées au site d'accès. Un agent antiplaquettaire (aspirine 75-100 mg) peut être administré pendant un mois après la procédure, bien que les preuves soient limitées. Les médicaments antihypertenseurs du patient sont maintenus, y compris le jour de l'intervention, sauf contre-indication anesthésique.

La durée totale de la procédure est d'environ une heure, et le patient est surveillé jusqu'au lendemain matin à l'hôpital. Une intervention en ambulatoire peut être organisée, à condition de fournir des instructions de suivi claires au patient. Les risques à la fin de la procédure et pendant la période d'hospitalisation sont ceux associés au point de ponction artériel fémoral (hématome, pseudoanévrisme…). Ce risque de complication peut être minimisé par une ponction artérielle guidée par échographie et par l’utilisation des systèmes de fermeture artérielle en fin de procédure.

Le suivi post-DR

Le suivi post-procédure consiste à l'optimisation des médicaments antihypertenseurs après la DR et la surveillance de l'évolution de l'hypertension. Le suivi de la PA est idéalement effectué par en automesure tensionnelle ou en MAPA (au moins à 1, 3, 6 et 12 mois).

La créatinine plasmatique peut être mesurée idéalement dans les 30 jours, en fonction du débit filtration glomérulaire estimé avant la DR et de la quantité de produit de contraste injecté pendant la procédure. Bien que les complications rénales soient rares, il est suggéré de réaliser un angio-scanner artériel rénal ou une échographie Doppler entre 6 et 12 mois après la DR pour détecter la survenue d'une sténose de novo d’une artère rénale.

Enfin, toutes les données des patients bénéficiant d’une DR devront être collectées dans un registre national français afin de faciliter le suivi et l'évaluation des résultats de la DR en voie réelle.

1En France, le cathéter de radiofréquence SPYRAL et le cathéter à ultrasons Paradise ont reçu de la part de la HAS l’indication de remboursement pour le traitement de l’HTA résistante malgré quatre médicaments antihypertenseurs prescrits selon les standards de soins.

 

Références

Atul Pathak, Romain Boulestreau, Marc Sapoval, Pierre Lantelme, Beatrice Duly- Bouhanick, Hakim Benamer, Theodora Bejan-Angoulvant, Antoine Cremer, Laurence Amar, Nicolas Delarche, Olivier Ormezzano, Pierre Sabouret, Francois Silhol, Philippe Sosner, Marilucy Lopez-Sublet, Ariel Cohen, Pierre Yves Courand, Michel Azizi.

Catheter-based renal denervation in the treatment of arterial hypertension: An expert consensus statement on behalf of the SFHTA (French Society of Hypertension), SFR (French Society of Radiology), GACI (French Society of Interventional Cardiology), SFC (French Society of Cardiology), CNCF (French Association of Private Cardiologists), CNCH (French Association of Hospital Cardiologists), SFCTCV (French Society of Thoracic and Cardiovascular Surgery) and SCVE (French Society of Vascular and Endovascular Surgery).

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