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RECORD MI - Une étude observationnelle sur l’insuffisance cardiaque en post-infarctus du myocarde
Publié le jeudi 31 août 2023
Auteur :
Valentin Roger
Membre du Collège des Cardiologues en Formation,
Montpellier
Relecteur :
Charles Fauvel
Président du Collège des Cardiologues en Formation,
Rouen
En direct de l'ESC Congress 2023
D'après la présentation de Javed Butler (Dallas, États-Unis) : "Heart failure complicating acute myocardial infarction"
Les messages clés
- Malgré les avancées dans la sphère du traitement de l’infarctus du myocarde (IDM), il existe encore un grand risque de développer une insuffisance cardiaque (IC) post-IDM (estimé à environ 30 % dans ce registre). Ce risque surpasse de présenter une récidive d’infarctus (environ 5 %).
- L’IC se développe précocement dans la majorité des cas (environ 65 % diagnostiquées durant l’hospitalisation initiale). Elle est associée à une mortalité de 10 % à 1 an, et à une hospitalisation pour motif cardiovasculaire de 30 % dans l’année qui suit l’infarctus.
- Ces résultats soulignent l’importance de développer de nouvelles stratégies thérapeutiques et de prévention pour limiter le risque d’IC post IDM.
Introduction
De nombreux progrès ont été faits pour limiter les complications mécaniques ou rythmiques dans la gestion de l’infarctus du myocarde (IDM). Au contraire, c’est la récidive d’IDM, ainsi que l’apparition d’une insuffisance cardiaque (IC), qui font partie des complications majeures en post-IDM.
Il existe néanmoins peu de données récentes qui évaluent le risque de récidive d’infarctus et d’apparition d’IC en post-syndrome coronarien aigu.
L’étude RECORD-MI a été initiée dans le but de répondre à cette problématique.
Méthodologie
RECORD-MI est une étude observationnelle, rétrospective, se basant sur les registres de 28 hôpitaux se situant aux États-Unis.
L’analyse a inclus 6 804 patients qui avaient eu un diagnostic d’IDM (STEMI et NSTEMI) sur une période de 7 ans (de janvier 2015 à décembre 2021).
Les critères d’intérêts étaient, à 1 an, la récidive d’infarctus, la mortalité, la réhospitalisation pour causes cardiovasculaires, ainsi que les cas incidents d’IC.
Résultats
Parmi les 6 804 patients inclus (1 586 STEMI et 5 218 NSTEMI), l’âge médian était de 68,9 ans, les femmes représentaient 40,3 % de la population, et la majorité des patients avaient une FEVG ≥ 50 % (58,4 %). On notait également une dyslipidémie, une hypertension artérielle et un diabète de type 2 chez respectivement 87,2 %, 89,3 % et 47,8 % des patients.
Après un an (Figure 1), chez les patients qui étaient sortis vivants de leur hospitalisation pour infarctus, 5,8 % avaient présentés un nouvel infarctus du myocarde, 10,1 % étaient décédés, 31,5 % étaient décédés ou avaient présenté un cas incident de décompensation cardiaque et 35,2 % avaient été réhospitalisés.
Figure 1 : Les critères d’intérêts à un an post-infarctus (stratifiés selon la situation concernant l’insuffisance cardiaque)
Source : présentation de Javed Butler (Dallas, États-Unis) à l’ESC Congress 2023
De manière significative, il y avait plus de récidives d’infarctus, de décès et de réhospitalisations chez les patients qui avaient présenté un NSTEMI que ceux qui avaient présenté un STEMI.
Chez les patients qui étaient sortis vivants de leur hospitalisation pour IDM et qui n’avaient jamais présenté d’IC, 31,3 % (1 578 / 5 047) ont développé une IC pendant la première année post-infarctus. Parmi celles-ci, 64,6 % avaient été diagnostiqués durant l’hospitalisation initiale, 19,5 % lors d’une autre hospitalisation et 15,9 % en externe.
Parmi les patients qui avaient déjà un antécédent d’IC avant leur infarctus, le risque de décès, de réhospitalisations et de mortalité était bien plus élevé que ceux n’avaient pas l’antécédent (deux fois plus de récidives d’infarctus (9,9% contre 4,6%) et de réhospitalisations (56,1% contre 28,9%) ; trois fois plus de décès (20,8% vs 6,9%).
Chez les patients qui n’avaient jamais présentés d’IC, le risque de présenter une insuffisance cardiaque était bien plus important que celui d’avoir un nouvel infarctus (31,3 % contre 4,6 %). Parmi ceux-ci, les patients ayant présenté une IC étaient aussi significativement plus à risque de récidiver un infarctus, d’être réhospitalisés, et de décéder, que ceux n’ayant pas développé d’IC (9,2 % vs 2,5 %, 54,7 % vs 17,2 % et 11 % vs 5 % respectivement).
Concernant les cas d’insuffisances cardiaques, incidents post-infarctus, 35,2 % étaient à FEVG préservée (482 / 1 369), 26,5 % à FEVG modérément altérée (363 / 1 369) et 38,2 % à FEVG altérée (524 / 1 369). Il n’y avait pas de différence significative concernant la mortalité toute cause entre ces trois groupes (Figure 2).
Figure 2 : Analyse sur les types d’insuffisance cardiaque développés et leur impact sur la mortalité
Source : présentation de Javed Butler (Dallas, États-Unis) à l’ESC Congress 2023
Conclusion
RECORD-MI montre, malgré les progrès thérapeutiques concernant la prise en charge de l’infarctus du myocarde et la prévention de l’IC, que le risque de développer une IC post-infarctus est encore très élevé, bien plus que la récidive d’IDM.
Ces épisodes d’IC interviennent précocement, et sont associés à une mortalité et un nombre de réhospitalisation élevés. Il est donc primordial de développer des stratégies thérapeutiques pour limiter leur apparition.
Pour aller plus loin
Cette étude apporte des données épidémiologiques intéressantes. Cependant, il ne faut pas oublier que cette étude est rétrospective, et que le diagnostic d’IDM était basé sur la classification ICD ("International Classification of Diseases"), ce qui a pu entrainer un biais de classement.
Un biais de survie est aussi à noter, puisque les incidents d’IC au moment de l’infarctus ne prenaient pas en compte les patients qui sont décédés avant de présenter un nouvel épisode de décompensation.
Pour en savoir plus, consultez les LBS, LBT et hotlines complètes, en langue anglaise, présentées lors de l'ESC 2023 :
Toute l'actualité de l'ESC 2023
Cette couverture de congrès vous est proposée grâce au soutien institutionnel de
l'alliance Boehringer Ingelheim - Lilly, de CSL Vifor et de Sanofi
Ce compte rendu d'étude ne reflète pas l'opinion de Cardio-online ou de la SFC, et n'engage pas leur responsabilité.
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