Étude POTCAST: effet de l’augmentation de la kaliémie chez les patients à haut risque d’arythmie ventriculaire

En direct du congrès de l'ESC 2025

Publié le samedi 30 août 2025

Antonin Trimaille

Antonin Trimaille

Cardiologie interventionnelle - Strasbourg

 

Messages clés

  • Selon les données observationnelles, une kaliémie basse est associée à une augmentation du risque d’arythmies ventriculaires chez les patients atteints de cardiopathies.
  • L’essai POTCAST a évalué si l’augmentation de la kaliémie vers des valeurs normales hautes pouvait améliorer le pronostic chez des patients porteurs de défibrillateur (DAI).
  • L’optimisation de la kaliémie (régime, supplémentation, antagonistes des récepteurs aux minéralocorticoïdes) a réduit la charge arythmique sans signal de sécurité défavorable.

 

Le chiffre à retenir

24%, c’est la réduction relative du critère de jugement principal par la stratégie interventionnelle.

 

Résumé de l'étude

L’hypokaliémie et les kaliémies normales basses semblent associées à une augmentation du risque d’arythmies ventriculaires dans les études observationnelles chez les patients porteurs de cardiopathies.

Bien que la correction des hypokaliémies franches fasse partie de la pratique courante, la question du bénéfice d’une stratégie proactive visant à maintenir la kaliémie dans la zone « normale haute » (4,5–5,0 mmol/L) n’avait pas jusqu’ici été étudiée.

 

Objectif

L’essai POTCAST (Targeted Potassium Levels to Decrease Arrhythmia Burden in High-Risk Patients with Cardiovascular Diseases) avait pour but d’évaluer l’efficacité et la sécurité d’une telle stratégie chez des patients à haut risque rythmique, définis par la présence d’un défibrillateur automatique implantable (DAI).

 

Méthodes

Il s’agit d’un essai de supériorité, multicentrique, ouvert, randomisé, mené au Danemark.

  • Critères d’inclusion : patients de plus de 18 ans, porteur d’un DAI ou d’un défibrillateur resynchroniseur (CRT-D) avec une kaliémie ≤4,3 mmol/L à l’inclusion.
  • Critère d’exclusion : insuffisance rénale chronique avec un DFG < 30 ml/min/1,73 m² ou grossesse notamment.
  • Participants randomisés en 1 : 1 en deux groupes :
    •  Groupe interventionnel visant une kaliémie « normale-haute » recevant des recommandations diététiques avec une supplémentation potassique (chlorure de potassium) et/ou un antagoniste des récepteurs aux minéralocorticoïdes (ARM), visant une kaliémie à 4,5–5,0 mmol/L.
    • Groupe contrôle en traitement usuel
  • Critère principal : critère composite incluant tachycardie ventriculaire soutenue >125bpm, thérapie appropriée délivrée par le DAI, hospitalisation non planifiée (>24h) pour arythmie ou insuffisance cardiaque, ou décès toute cause.

 

Résultats

  • 1200 patients inclus, suivis sur une durée médiane de 39.6 mois. Âge moyen des participants de 62,7 ans, 20 % de femmes, et environ 65 % d’insuffisants cardiaques. Kaliémie moyenne initiale à 4,01 mmol/L.
  • Critère de jugement principal : survenu chez 22,7 % du groupe interventionnel contre 29,2 % dans le groupe contrôle, soit un HR de 0,76 (IC95% 0,61–0,95 ; p=0,01). Le nombre de patients à traiter pour éviter un événement était de 12,3.
  • Composantes du critère de jugement principal
    • Thérapie appropriée du DAI ou tachycardie ventriculaire soutenue : 15,3 % vs 20,3 % (HR 0,75 ; IC95 % 0,57–0,98).
    • Hospitalisation pour arythmie : 6,7 % vs 10,7 % (HR 0,63 ; IC95 % 0,42–0,93).
    • Hospitalisation pour insuffisance cardiaque : 3,5 % vs 5,5 % (HR 0,64 ; IC95 % 0,37–1,11). Décès toute cause : 5,7 % vs 6,8 % (HR 0,85 ; IC95 % 0,54–1,34).
  • Tolérance : hospitalisations pour hyper/hypokaliémie ou insuffisance rénale similaires entre groupes (≈3 %). Pas de décès liés au protocole.
  •  Adhésion : 95 % des patients ont terminé la phase d’ajustement médicamenteux. Environ 66 % recevaient un ARM en fin d’ajustement, et 79 % une supplémentation potassique. La kaliémie a augmenté de 4,01 à 4,36 mmol/L (contre 4,01 à 4,05 mmol/L dans le groupe contrôle). Moins de la moitié des patients ont atteint l’objectif de 4,5–5,0 mmol/L, mais 75 % ont maintenu l’adhésion au traitement.
  • Analyses en sous-groupes : pas de différence entre les sous-groupes spécifiés à l’avance, notamment entre les patients traités par MRA ou supplémentation potassique.

 

Discussion

Une augmentation moyenne modeste (+0,3 mmol/L) de la kaliémie a suffi à réduire significativement la charge en arythmie et les hospitalisations. L’effet semblait davantage lié à la prévention des épisodes d’hypokaliémie qu’à l’atteinte stricte de la cible normale-haute. Cette stratégie, simple et peu coûteuse pourrait constituer une approche complémentaire pour réduire la charge en arythmie chez les patients à haut risque.

L’étude présente toutefois des limites : restriction aux patients porteurs d’un DAI, exclusion des insuffisants rénaux sévères, conduite dans un seul pays, absence d’aveugle, faible taille de certains sous-groupes et représentativité limitée aux populations européennes.

Etude potcast methode.jpg

Figure 1 : méthode

Etude potcast résultats.jpg

Figure 2 : résultats

 

D’après la présentation de Henning Bundgaard, MD, Ph.D., D.M.Sc. The Heart Centre, Rigshospitalet, Denmark.

Conclusion

Chez des patients atteints de maladies cardiovasculaires à haut risque rythmique, porteurs d’un DAI, une stratégie d’élévation de la kaliémie vers la zone haute de la normale a réduit le risque d’événements graves liés aux arythmies ventriculaires et à l’insuffisance cardiaque, sans compromettre la sécurité.

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