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Étude ALONE-AF : gestion des anticoagulants à distance des ablations de FA
En direct du congrès de l'ESC 2025
Publié le mardi 2 septembre 2025
Messages clés
- Après une ablation de FA, la poursuite de l’anticoagulation orale dépend du risque thrombo-embolique du patient (estimé par le CHA2DSV2ASc) quel que soit le succès de l’intervention.
- ALONE-AF est une des 1ères études contrôlées randomisées de forte puissance ayant comparé la poursuite et l’arrêt des AOD à 1 an de l’ablation chez des patients sans récidive de FA.
- L’arrêt des AOD a permis de diminuer la survenue d’un critère composite comprenant les saignements majeurs, les AVC et les embolies systémiques. Ainsi, chez certains patients bien sélectionnés, les résultats de ALONE-AF suggère donc qu’il n’est pas délétère de suspendre l’anticoagulation à distance d’une ablation en l’absence de récidive documentée.
Le chiffre à retenir
En arrêtant les AOD chez les patients sans récidive de FA à 1 de leur ablation, le risque d’événements indésirables majeurs est diminué de 2%.
Méthodologie et résultats
Contexte
L’ablation de fibrillation atriale a montré sa supériorité par rapport aux autres stratégies de contrôle du rythme pour réduire la charge en FA et ainsi améliorer la qualité de vie des patients. Cependant, après une intervention réussie, de nombreux patients restent anticoagulés au long cours, y compris en l’absence de récidive de trouble du rythme puisque la poursuite de l’anticoagulation est basée sur le score de CHA2DS2VASc.
L’objectif d’ALONE-AF était de comparer l’impact de l’arrêt versus la poursuite des AOD chez des patients avec risque thrombo-embolique (évalué par le CHA2DS2VASc) mais qui n’avaient pas présenté de récidive de leur FA à 1 an de l’ablation.
Méthodes
Il s’agit d’une étude coréenne prospective, multicentrique, ouverte, contrôlée et randomisée en 1:1, dans laquelle ont été inclus 840 patients porteurs d’une FA non valvulaire ablatée depuis au moins 12 mois avec un CHA2DS2-VASc ≥ 1 chez les hommes et 2 chez les femmes.
L’absence de récidive était confirmée par au moins deux holters sur 24-72h et deux ECG réalisés dans l’année qui suivait l’ablation.
Les AOD utilisés étaient l’apixaban, le rivaroxaban ou l’edoxaban aux doses recommandées.
Le critère de jugement principal était un critère composite comprenant la survenue d’un AVC, d’une embolie systémique ou d’un saignement majeur.
Les critères secondaires comprenaient chacun des éléments de ce critère composite, les saignements cliniquement significatifs (mais non majeurs), la mortalité toute cause, la survenue d’un IDM, d’une EP, d’un AIT ou une hospitalisation toute cause.
Résultats
Au total, 840 patients ont été inclus (417 dans le groupe sans AOD et 423 dans le groupe AOD). Il s’agissait majoritairement d’hommes (75%), de 64 ans en moyenne. Environ 2/3 des patients étaient porteurs d’une FA paroxystique, le dernier tiers étant des FA persistantes.
Les patients étaient globalement comparables entre les deux groupes et le CHA2DS2VASc moyen s’élevait à 2, de même que le score HAS-BLED.
La majorité des patients ont été traités par radiofréquence (85% en moyenne) et le reste par cryothérapie. Les lésions réalisées consistaient dans 100% des cas en une isolation des veines pulmonaires, à laquelle s’ajoutait parfois des tirs complémentaires sur l’isthme cavo-tricuspide ou dans l’oreillette gauche.
Après 2 ans de suivi, en intention de traiter, le critère de jugement principal a été rencontré chez 2,2% des patients pour qui l’anticoagulation a été poursuivie, contre 0,3% des patients sans traitement, soit une différence de risque absolue de presque 2% (p=0,024, Figure 1 et Figure 2).
Figure 1
Figure 2
Cette différence est sous-tendue par un plus grand nombre de saignements majeurs (différence absolue de –1,4% [IC−2,6 to −0,2], p=0,03) sans diminution du risque d’événements thrombo-emboliques (- 0,5%, [IC −1,6 to 0,6], p=0,34). Les autres critères secondaires étaient distribués de façon équivalente dans les deux groupes sans différence significative.
Références
D’après la présentation du Pr Boyoung Joung.
Conclusion
Dans cet essai randomisé ayant cherché à personnaliser la stratégie antithrombotique à distance d’une ablation de FA réussie, cette étude montre que l’arrêt des AOD n’est pas associé à un surrisque d’AVC ou embolies systémiques, et moins de saignements majeurs.
Cependant, il faut garder en tête que i) ces trois critères n’ont pas été évalués indépendamment les uns des autres et que ce résultat est drivé par une diminution des hémorragies majeures, ii) le nombre d’événements emboliques s’est avérés particulièrement bas, de même que le CHA2DS2VASc, suggérant que la population d’étude avait un risque thrombo-embolique bas initialement, iii) l’absence de récidive d’arythmie était basée sur des examens peu sensibles ne permettant pas d’intégrer dans la réflexion la charge en FA, que l’on sait pourtant intimement liée à l’évolution des patients.
ALONE-AF invite donc à repenser au cas-par-cas la pertinence d’une anticoagulation à vie afin de limiter, chez des patients bien sélectionnés, les conséquences délétères de ce traitement.
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