DASE-AI – Détection de la sténose aortique par échocardiographie à l’aide de l’intelligence artificielle

Publié le jeudi 31 août 2023

Soundous M bare

Auteure :
Soundous M’RABET
Membre du Collège des Cardiologues en Formation,
Dijon

Charles Fauvel

Relecteur :
Charles FAUVEL
Président du Collège des Cardiologues en Formation,
Rouen

En direct de l'ESC Congress 2023

D'après la présentation de Geoffrey A. Strange (Sydney, Australie) : "DASE-AI: Detect Aortic Stenosis by Echo with Artificial Intelligence"

Les messages clés

  • L’intelligence artificielle est un outil intéressant, en complément de l’expertise des cliniciens, de plus en plus utilisée dans le domaine de la médecine.
  • Dans cette étude, l’IA a permis de détecter davantage de sténoses aortiques serrées que l’analyse des cliniciens, suggérant qu’elle pourrait être utilisée comme complément à une analyse clinique dans le futur.

Introduction

Une étude de cohorte a démontré que l’intelligence artificielle (IA) pouvait être une aide à la détection de sténoses aortiques en stratifiant les patients en plusieurs groupes de probabilité de rétrécissement aortique. Cette étude était limitée par l’absence de comorbidités et l’absence de comparaison de l’IA avec des cliniciens.

Ainsi, cette étude de cohorte rétrospective, multicentrique, avec adjudication à l’aveugle du groupe IA, teste l’hypothèse qu’un système automatisé d’alerte basé sur l’IA (SAA-IA) pourrait améliorer l’identification de sténoses aortiques sévères dans une large cohorte de patients ayant déjà bénéficié d’une échocardiographie transthoracique (ETT) au sein de deux hôpitaux australiens.

Les parcours de prise en charge ont ensuite été comparés entre les diagnostics initiaux des cliniciens versus l’apport du SAA-IA.

Principe de l'étude, méthodologie et résultats

Méthodologie

La population initiale comportait 21 749 patients âgés ≥ 18 ans et ayant bénéficié d’une ETT dans 2 hôpitaux en Australie. Après exclusion des patients avec antécédents de remplacement valvulaire aortique et avec des données manquantes d’ETT, la population d’étude comprenait 9 189 patients, dont 5 132 hommes et 4 057 femmes (Figure 1).

DASE-AI-Figure1

Figure 1 : Flow chart et résultats de l'étude DASE-AI

Source : présentation de Geoffrey A. Strange (Sydney, Australie) durant l'ESC 2023

L’ETT était réalisée dans le cadre de la prise en charge habituelle des patients. Les données hémodynamiques (surface aortique indexée, Vmax et FEVG) ont ensuite été extraites de la base de données et analysées par l’algorithme d’IA (logiciel EchoSolv), en aveugle de toute information clinique, pour être stratifiées en 3 groupes. Les groupes d’IA ont ensuite été révisés par 2 fellows indépendants ayant accès à l’ETT initiale et les données cliniques, afin de déterminer si ces groupes étaient concordants ou discordants avec les diagnostics et prises en charges initiaux.

Résultats

Les interprétations des ETT par les cliniciens mentionnaient la présence d’une sténose aortique sévère dans 218 / 9 189 cas soit 2,4 %. Le SAA-IA a classé 4,1 % des ETT dans la catégorie "sévère", selon les recommandations, soit 376 patients. L’IA a ainsi repéré 72 % de patients supplémentaires.

Concernant les prises en charge médicales des rétrécissements aortiques (RA) selon les cliniciens, 45,5 % des patients dans le groupe RA serré, selon les recommandations, ont bénéficié d’une intervention, 14,9 % d’un traitement médical et 39,6 % n’avaient aucune décision de prise en charge. Dans le groupe « phénotype RA serré » (selon le SAA-IA), 18,2 % ont bénéficié d’une intervention et 60 % aucune décision.

Les caractéristiques des patients avec RA serré versus RA non serré, classés par les cliniciens, étaient similaires, bien que près de 50 % des patients considérés comme n’ayant pas de RA serré remplissaient les critères de RA serré, selon les recommandations. Il existe notamment un biais hémodynamique avec un gradient moyen non serré mais une surface aortique proche du seuil (Figure 2).

DASE-AI-Figure-2

Figure 2 : Caractéristiques de la cohorte stratifiée selon le compte-rendu ETT initial

Source : présentation de Geoffrey A. Strange (Sydney, Australie) durant l'ESC 2023

Les patients considérés comme ayant un RA serré, mais dont la prise en charge n’a pas été décidée, n’ont pas de raison apparente pour le manque de décision, hormis 33 % des cas, qui présentaient des contre-indications pour une prise en charge interventionnelle.

Les femmes avaient 79 % de chances en moins par rapport aux hommes d’être diagnostiquées d’un RA serré (OR ajusté 0,21, 95 % CI 0,10-0,45 ; p < 0,001).

Ainsi, l’apport de l’IA au diagnostic humain pourrait rediriger 2,1 fois plus de femmes (29,8 %-62,1 %) et 1,6 fois plus d’hommes (44,9 %-73,5 %) vers une prise en charge définitive.

Conclusion

L’étude DASE-AI montre que l’IA a détecté 72 % de patients supplémentaires à risque sévère de RA, quand elle est utilisée en complément du diagnostic humain. Les femmes étaient particulièrement sujettes à être sous-diagnostiquées par l’analyse humaine seule. L’IA semble se passer du biais inconscient en lien avec le sexe, les indices hémodynamiques et les symptômes.

L’étude est toutefois limitée par le fait qu’elle ne soit pas randomisée et que le SAA-IA détecte des patients avec des comorbidités importantes, souvent contre-indiqués à une prise en charge interventionnelle.

L’IA n’est pas destinée à remplacer l’expertise des cliniciens, mais pourrait être introduite dans les logiciels de comptes-rendus d’ETT dans le futur, afin de déclencher une alerte en cas d’identification de RA serré.

Pour en savoir plus, consultez les LBS, LBT et hotlines complètes, en langue anglaise, présentées lors de l'ESC 2023 :

Toute l'actualité de l'ESC 2023

  

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Ce compte rendu d'étude ne reflète pas l'opinion de Cardio-online ou de la SFC, et n'engage pas leur responsabilité.

 

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