L’infection au COVID-19 chez les patients avec maladies cardiovasculaires et cancer

Sélectionné dans JACC: CardioOncology par Orianne Weizman

Mis à jour le jeudi 9 avril 2020
Orianne Weizman

 

Par Orianne Weizman (CCF, Nancy).

 

Relecture par Guillaume Bonnet (CCF, Paris).

Collège des Cardiologues en Formation

Auteurs :
Ganatra S, Hammond SP, Nohria A

Référence :
JACC: CardioOncology (2020)

Date de publication :
Mars 2020

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Le résumé de Orianne Weizman

  • Au cours de la pandémie de COVID-19, les patients avec antécédent de cancer et maladies cardiovasculaires ont un risque augmenté d’acquérir l’infection et de présenter des évènements sévères avec un pronostic plus sombre ;
  • Ces patients sont aussi plus à risque de cardiotoxicité du COVID-19 : myocardite, insuffisance cardiaque, agression myocardique, fibrillation atriale, arrêt cardiaque ;
  • Tableau clinique du COVID-19 pouvant parfois être proche de la présentation de l’infarctus ou de l’insuffisance cardiaque avec symptômes communs cardiologiques (palpitations, oppression thoracique) ;
  • Proposition d’un algorithme de prise en charge. 

Antécédent de cancer et maladie cardiovasculaire

Les patients avec un antécédent de cancer ou porteurs d’un cancer actif sont plus à risque d’infection.

Dans ce contexte de pandémie de COVID-19, la dissémination par des porteurs sains pose problème pour ce sous-groupe de population. Parmi les patients infectés par le COVID-19, 1% ont un antécédent de cancer (5 fois plus que l’incidence générale du cancer de 0.2% en Chine)1. Chez les patients porteurs d’une pneumopathie liée au COVID-19, 40% étaient porteurs d’une maladie cardiovasculaire (coronaire ou cérébrovasculaire) ou de facteurs de risque cardiovasculaire (diabète, hypertension).

Suivi

Les patients porteurs d’un cancer, de toute localisation, étaient plus âgés, plus souvent fumeurs avec une dyspnée rapidement progressive et un scanner thoracique anormal.

Dans une étude sur 1590 patients infectés par le COVID 19 en Chine, 1% avaient un antécédent de cancer, le plus souvent du poumon. Ces patients étaient plus souvent hospitalisés en réanimation avec nécessité de ventilation mécanique ou plus à risque de décès, surtout s’ils avaient bénéficié de chimiothérapie ou de chirurgie oncologique. Le taux de mortalité était de 5,6% contre 1% en population générale2.

Le taux de mortalité chez les patients avec antécédents cardiovasculaires était également significativement plus élevé : 13,2%, de même chez les patients à haut risque cardiovasculaire sans évènement cardiovasculaire encore déclaré.

Atteinte cardiaque

Les patients atteints du COVID-19 présentent une atteinte myocardique liée à une cardiotoxicité directe (myocardite parfois fulminante) ou à une atteinte fonctionnelle (IDM de type 2) en lien avec la gravité du tableau clinique3. Les complications cardiovasculaires pourraient jouer un rôle dans la sévérité de la maladie et ses complications sévères. A noter également des complications rythmiques : fibrillation atriale, troubles du rythme ventriculaire avec arrêt cardiaque. Ce virus pourrait avoir des effets à long terme sur le métabolisme lipidique et glucidique qui restent à évaluer.

Le mécanisme évoqué est que l’enzyme de conversion de l’angiotensine de type 2 4 qui est le point d’entrée cellulaire du coronavirus, est hautement exprimé dans les poumons et le myocarde.

Prise en charge

L’atteinte myocardique significative peut nettement compliquer la prise en charge du patient avec défaillance respiratoire liée au COVID-19.

Les patients porteurs d’un cancer peuvent présenter des symptômes atypiques et conduire malgré tout à une forme sévère de la maladie.

Des palpitations ou une oppression thoracique ont également été décrits lors de l’infection par le COVID-19. Les tableaux d’insuffisance cardiaque, de syndrome coronaire aigu et d’infection par le COVID-19 peuvent donc se recouper et rendre le diagnostic plus difficile.

Le monitorage hémodynamique rapproché et la suppléance respiratoire sont les 2 éléments clés de la prise en charge du patient sévère. Les pistes thérapeutiques sont en cours d’évaluation (remedesivir, anti-IL6 type tocilizumab,…).

Pour les patients atteints d’un cancer en cours de traitement, il faut discuter au cas par cas d'un report des traitements antinéoplasiques associés de toute façon à un confinement strict.

Bibliographie

1.  Chen N, Zhou M, Dong X et al. Epidemiological and clinical characteristics of 99 cases of 2019 novel coronavirus pneumonia in Wuhan, China: a descriptive study. Lancet 2020;395:507-513.

2.  Liang W, Guan W, Chen R et al. Cancer patients in SARS-CoV-2 infection: a nationwide analysis in China. Lancet Oncol 2020;21:335-337.

3.  Zhou F, Yu T, Du R et al. Clinical course and risk factors for mortality of adult inpatients with COVID-19 in Wuhan, China: a retrospective cohort study. The Lancet 2020.

4.  Zheng Y-Y, Ma Y-T, Zhang J-Y, Xie X. COVID-19 and the cardiovascular system. Nature Reviews Cardiology 2020.