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Perspectives sur la prise en charge de la mort subite chez le patient en post-infarctus
Publié le lundi 3 mars 2025
D’après l’étude WICD-MI (Wearable then Implantable Cardioverter Defibrillator after Myocardial Infarction) Echivard, M., et al. (2024). Prognostic value of ventricular arrhythmia in early post-infarction left ventricular dysfunction: the French nationwide WICD-MI study. European Heart Journal, 45(41), 4428–4442.
Messages clés :
- Chez les patients présentant une dysfonction ventriculaire gauche, la survenue d'un trouble du rythme ventriculaire soutenu (TV/FV) dans la phase précoce post-infarctus — entre la sortie d'hospitalisation et la réévaluation à 3 mois — constitue un tournant pronostique, associé à un risque accru de récidive et de décès à un an
- Au-delà de l’implantation du DAI, ces patients nécessitent probablement une prise en charge plus intensive et précoce, tant sur le plan rythmique que de l’insuffisance cardiaque
- Au-delà de son rôle thérapeutique, le gilet défibrillateur peut contribuer à la stratification du risque rythmique
- Dans cette étude « de vraie vie », le taux de survie des patients présentant une dysfonction ventriculaire gauche persistante post infarctus est plutôt bon, atteignant 90 % avec un suivi médian de 2,6 ans post-DAI
La mort subite par trouble du rythme ventriculaire constitue l'une des principales complications de l’IDM avec dysfonction VG. Sa prévention joue un rôle essentiel dans la prise en charge des patients post-infarctus. Chez ceux présentant une dysfonction VG à la sortie d'hospitalisation, il est recommandé de réévaluer la FEVG à 3 mois (ou à 40 jours en l'absence de revascularisation) afin de déterminer l'indication d'un DAI. Durant cette "phase d'attente", le patient peut être protégé par le port d'un gilet défibrillateur (LifeVest). Cette période, qualifiée de "post-infarctus précoce" dans l'étude, est particulière : elle se caractérise par un remodelage ventriculaire actif, un risque maximal de mort subite au cours du premier mois, et l'absence de bénéfice prouvé de l'implantation précoce d'un DAI en prévention primaire.
L'étude s'est penchée sur la valeur pronostique des arythmies ventriculaires durant cette phase : s'agit-il d'événements fortuits ou, au contraire, de marqueurs prédictifs de récidive et de mortalité ultérieure ? L’étude a inclus rétrospectivement les patients de 41 centres français ayant présenté un IDM avec dysfonction VG (entre 2015 et fin 2020), équipés d’une LifeVest à la sortie d’hospitalisation, puis d’un DAI en prévention primaire ou secondaire. Les critères d’évaluation étaient en particulier la survenue, après l’implantation du DAI, d’un trouble du rythme ventriculaire ou du décès, à 1 an et durant le suivi.
Au total, 1032 patients ont été inclus, dont 74,8 % présentaient un IDM ST+. La durée médiane de port de la LifeVest était de 85 jours, et le suivi médian après l’implantation du DAI de 2,6 ans. Une arythmie ventriculaire soutenue est survenue chez 7 % des patients (72 cas) durant le port de la LifeVest. Celle-ci a permis de préciser la typologie des arythmies : 1/4 étaient des FV et 3/4 des TV. Parmi ces TV, la moitié a conduit à une délivrance de choc électrique par la LifeVest. Les arythmies apparaissaient souvent précocement, avec un délai médian de 10 jours après la mise en place du dispositif. Les orages rythmiques n’étaient pas rares, observés dans 22,9 % des cas.
Les arythmies ventriculaires traitées par le DAI étaient significativement plus fréquentes chez les patients ayant présenté une TV/FV sous LifeVest, comparés à ceux sans, à 1 an (22,2 % vs. 3,5 %, p < 0,0001) et durant le suivi (30,6 % vs. 8,2 %, p < 0,0001). Cette différence se manifestait précocement après l’implantation du DAI (Figure 1).
Figure 1
La survenue de TV/FV sous LifeVest était un facteur de risque indépendant d’arythmie ventriculaire sous DAI, à 1 an (aHR = 6,91 [3,73–12,81], p < 0,0001) et durant le suivi (aHR = 3,86 [3,73–12,81], p < 0,0001).
Durant le suivi, 10,2 % des patients sont décédés, la moitié des causes identifiées étant dues à une insuffisance cardiaque (48 %). Les décès étaient significativement plus fréquents chez les patients avec TV/FV sous LifeVest que chez ceux sans, à 1 an (11,1 % vs. 3,4 %, p = 0,006) et durant le suivi (18,1 % vs. 9,6 %, p = 0,039). La présence de TV/FV sous LifeVest était un facteur de risque indépendant de décès à 1 an de l’implantation du DAI (aHR = 2,86 [1,28–6,39], p = 0,012), mais pas durant le suivi (p = 0,20) (Tableau).
Tableau
Conclusion
La survenue d’un trouble du rythme ventriculaire soutenu durant la phase précoce post-infarctus chez les patients présentant une dysfonction VG constitue un tournant pronostique, étant un facteur de risque de récidive précoce d’arythmie et de décès dans l’année. Ces patients nécessitent probablement une prise en charge plus agressive, tant sur le plan rythmique (notamment par ablation, dont l’efficacité devrait idéalement être évaluée dans une étude dédiée) que pour le traitement de l’insuffisance cardiaque.
Références
Echivard, M., et al. (2024). Prognostic value of ventricular arrhythmia in early post-infarction left ventricular dysfunction: the French nationwide WICD-MI study. European Heart Journal, 45(41), 4428–4442
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LifeVest® est un défibrillateur portable, dispositif médical de classe III, (CE0123), fabriqué par ZOLL Manufacturing Corp., indiqué pour le traitement des patients adultes à risque d'arrêt cardiaque soudain, et couvert par la sécurité sociale si prescrit par des centres autorisés dans les conditions et pour les indications médicales détaillées sous le code LPPR 1112161.