La Société française de cardiologie appelle à la création d'une filière de soins dédiée à l'insuffisance cardiaque

Publié le jeudi 30 septembre 2021
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APM news

PARIS, 27 septembre 2021 (APMnews) - Dans un livre blanc présenté le 27 septembre 2021, le groupe "insuffisance cardiaque et cardiomyopathies" (GICC) de la Société française de cardiologie (SFC) appelle à la création d'une filière de soins pour optimiser la prise en charge des patients, mieux les orienter dans le territoire et avoir une meilleure coordination entre les professionnels de santé.

L'insuffisance cardiaque concernerait environ "2 millions de personnes en France, un chiffre sous-estimé", selon le Pr Nicolas Lamblin, cardiologue au CHU de Lille et président du GICC, qui s'est exprimé lors d'une conférence de presse le lundi 27/09/21. Elle est responsable de 200 000 hospitalisations et 70 000 décès par an.

Surtout, "une augmentation de 25 % du nombre de personnes touchées est attendue tous les 4 ans", a-t-il poursuivi. "C'est une épidémie" et c'est "la pathologie chronique qui présente le coût le plus élevé pour la société", a renchéri le Pr Thibaud Damy, cardiologue à l'hôpital Henri-Mondor à Créteil (AP-HP) et ex-président du GICC, qui a initié les travaux sur le livre blanc.

Dans leur plaidoyer, d'environ 175 pages, le groupe d'experts formule une soixantaine de propositions pour une prise en charge de qualité.

Le GICC n'en est pas à son premier appel à une meilleure organisation. Déjà en 2019, il avait souligné le besoin d'améliorer le parcours de soins des insuffisants cardiaques dans l'étude "Insuffisance cardiaque: premiers symptômes-parcours de soin" (IC-PS2). Aujourd'hui, le livre blanc va plus loin. Il propose de relever quatre défis.

Dépistage automatique des personnes à risques

Il s'agit d'abord de lutter contre l'errance diagnostique. Les signes d'alerte - essoufflement, prise de poids, oedème et fatigue, dits "EPOF"- "ne sont pas assimilés chez le grand public" et "les patients estiment que ces symptômes peuvent être liés au vieillissement", a partagé le Dr Florence Beauvais, cardiologue à l'hôpital Lariboisière à Paris (AP-HP) et membre du GICC. Toutefois, ce manque de connaissances "mène au retard de diagnostic, à l'aggravation de la maladie puis à l'arrivée de patients aux urgences".

En plus de mieux informer le grand public et les soignants sur cet aspect, le groupe propose de développer le dépistage "approprié" auprès des personnes déjà à risques (cardiopathies ischémiques et valvulaires, hypertension, diabète, bronchopneumopathie chronique obstructive, insuffisance rénale, cancer…).

"Aujourd'hui, il n'est pas systématique de proposer un dépistage auprès des patients en ALD [affection de longue durée]. Pourtant nous avons des biomarqueurs, notamment le NT-proBNP, qui fonctionnent bien et permettraient au médecin traitant d'orienter son patient vers le cardiologue pour réaliser une échographie", a souligné le Pr Damy.

Une centaine de professionnels réunis dans la démarche OPTIM'IC avait également appelé en juin à une systématisation du dépistage précoce de l'insuffisance cardiaque.

Le second défi consiste à optimiser la prise en charge des patients. "La filière doit être organisée et aussi visible que celle créée pour les maladies rares", a cité pour exemple le Pr Damy. Le groupe suggère que les agences régionales de santé (ARS) établissent une liste des professionnels déjà impliqués dans l'insuffisance cardiaque à l'hôpital comme en ville afin de créer un maillage territorial et le faire connaître auprès des soignants et des patients. "Si le patient est orienté vers le bon interlocuteur, il n'arrivera pas aux urgences, mais sera pris en charge dans des unités de cardiologie", a poursuivi le Dr Beauvais. Ces filières régionales devraient comprendre "des référents de cardio-oncologie".

Le groupe plaide aussi pour une meilleure coordination ville-hôpital via les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) et les dispositifs d'appui à la coordination (DAC).

Plus d'infirmiers IPA, de protocole de coopération et de télésurveillance

Cette organisation va de pair avec une prise en charge multidisciplinaire et multiprofessionnelle, le 3e défi à relever. Le GICC considère que la création de nouveaux métiers avec une spécialisation dans cette maladie - des infirmières spécialisées en insuffisance cardiaque (Ispic) -, comme les infirmiers en pratique avancée (IPA) et des infirmiers de protocole de coopération, est nécessaire pour rendre la filière efficace.

Ces nouvelles fonctions ont déjà été inscrites dans la loi Ma santé 2022. Sur le terrain, ces métiers arrivent progressivement. "Nous avons formé 45 Ispic et l'objectif est d'arriver à 60 à la fin de l'année. Si on arrive à 200, nous arriverons à prendre en charge les patients les plus sévères qui grèvent le système hospitalier", a analysé l'ex-président du GICC.

Dernier défi à relever: proposer une alternative à l'hospitalisation aiguë. Ces nouveaux métiers comme les Ispic intégreraient les nouvelles technologies et notamment la télésurveillance. Les expérimentations Etapes, développées depuis 2014, ont fait leurs preuves selon la SFC.

"Les infirmiers optimisent les traitements, assurent la télésurveillance des patients à domicile, détectent les signaux de décompensation et orientent vers le gériatre, le cardiologue ou vers un centre de réadaptation cardiaque. Ils prennent environ 4 h par semaine pour gérer et comprendre toutes les alertes générées par la télésurveillance. Au bout, cela permet de diminuer les hospitalisations", a souligné le Pr Damy, qui appelle les pouvoirs publics à discuter du cadre et du financement de ce dispositif.

La SFC propose aussi de développer les soins en hospitalisation à domicile (HAD) et d'y introduire des "compétences cardiologiques" ou encore d'organiser l'administration de diurétique intraveineux dans des hôpitaux de jour "cardiologie".

Etude nationale EFHICA'S

En parallèle du livre blanc, le GICC a signalé son étude nationale, baptisée EFHICA'S, sur le fardeau et le handicap portés par le patient insuffisant cardiaque et son aidant. Elle a pour objectif de mettre en exergue les préoccupations réelles des patients et soignants au quotidien sur le plan professionnel, personnel, familial, social, médical ou encore socio-économique. Plus de 1 000 patients, 1 300 soignants et 500 aidants y ont participé. Les premières données indiquent que les aidants ont un rôle essentiel dans la gestion de la maladie, notamment le soutien moral ou l'accompagnement médical. Des résultats détaillés sont attendus dans "quelques semaines", a précisé la SFC.

Plaidoyer pour une prise en charge de l'insuffisance cardiaque et des cardiomyopathies

Source: APMnews

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