4 minutes de lecture
Gestion des syndromes coronaires aigus : actualités et perspectives des traitements antithrombotiques
USIC 2025
Le point de vue du Cours avancé USIC par les Jeunes du Groupe de l’USIC et du CCF
Publié le jeudi 11 décembre 2025
D’après la communication de Ingo Ahrens, président de l’ACVC.
Messages clés
- Après un syndrome coronaire aigu (SCA), une bithérapie antiagrégante plaquettaire est actuellement recommandée pendant 12 mois
- Des études récentes démontrent le bénéfice d’une désescalade plus précoce du traitement sur les évènements hémorragiques, sans majoration des évènements ischémiques, notamment chez les patients à haut risque de saignement
- Une durée minimale d’un mois semble cependant impérative pour tous les patients.
- Pour les anticoagulants, l’héparine non fractionnée reste le traitement de référence pendant les angioplasties des SCA
Méthodologie et résultats
Les traitements antithrombotiques utilisés dans le syndrome coronaire aigu (SCA) regroupent les traitements antiagrégants plaquettaires et les traitements anticoagulants. Le choix des stratégies antithrombotiques dans le cadre du SCA repose aujourd’hui sur l’évaluation individualisée des risques ischémique et hémorragique déterminant le rapport bénéfice / risque attendu du traitement.
La stratégie standard actuelle après un SCA est la prescription d’une bithérapie antiagrégante plaquettaire (DAPT) pour 12 mois associant de l’aspirine à un inhibiteur des récepteurs P2Y12.(1) Chez les patients à haut risque hémorragique, un consensus récent propose plusieurs stratégies de désescalade du traitement : raccourcir la durée de la DAPT à 6 mois, raccourcir la durée de prescription de l’aspirine et poursuivre uniquement le Clopidogrel ou le Ticagrelor, ou encore changer l’inhibiteur P2Y12 à forte activité pour du Clopidogrel à 1 mois.(2) (Figure 1)
Le moment propice à la désescalade du traitement reste néanmoins débattu et intervient en général entre 1 et 6 mois après le SCA.
Figure 1 : stratégies de désescalade du traitement antithrombotique après un SCA
L’étude TARGET-FIRST, publiée en août 2025, a évalué la prescription d’une monothérapie par inhibiteur de P2Y12 seul après un mois de bithérapie, en comparaison à la DAPT standard de 12 mois chez 1942 patients ayant présenté un SCA considéré à faible risque et revascularisé par angioplastie. L’incidence du critère de jugement principal à 11 mois, associant décès, infarctus du myocarde (IDM), thrombose de stent ou saignement majeur, était non inférieure dans le groupe monothérapie, atteignant le seuil de significativité statistique (différence de -0,09%, IC95%[-1,39 – 1,20], p = 0,02).(3) Cette stratégie de désescalade était par ailleurs supérieure à la DAPT sur la survenue de saignements significatifs (BARC 2, 3 ou 5), alors moins fréquents (HR 0,46, IC95%[0,29– 0,75], p = 0,002).
Cependant, l’étude NEO-MINDSET a illustré que cette désescalade du traitement ne devait pas se faire avant un délai d’un mois après le SCA, au risque d’un excès d’évènements ischémiques, bien que les hémorragies soient moins fréquentes dans le groupe traité par monothérapie.(4)
Concernant le traitement très précoce du SCA, des alternatives thérapeutiques au sein des antiagrégants plaquettaires sont aujourd’hui à l’étude. L’essai SOS-AMI évalue le Selatogrel, inhibiteur de P2Y12 à injection sous-cutanée pouvant être auto-administré en extrahospitalier en cas de symptôme suspect de récidive de SCA. Les résultats de cette étude sont prévus pour 2026.(5)
Récemment, l’essai CELEBRATE a étudié l’efficacité du Zalunfiban, inhibiteur du GPIIb/IIIa (en une injection unique sous-cutanée) verrouillant son récepteur en position inactive, en contexte préhospitalier en plus d’une bithérapie antithrombotique.(6) Bien que des saignements modérés étaient plus fréquents avec ce traitement, il permettait de réduire de façon significative l’incidence de thrombose aiguë de stent dans les 24 premières heures ainsi que l’élévation des troponines à la phase aiguë des SCA.
Concernant les traitements anticoagulants, les recommandations actuelles préconisent l’utilisation d’héparine non fractionnée (HNF) avant angioplastie en urgence de tout SCA. En l’absence de sus-décalage du segment ST, une alternative par héparine de bas poids moléculaire (HBPM) ou Fondaparinux peut être discutée.(1)
L’essai RIGHT mené en Chine sur près de 3000 patients avec un IDM a montré que la poursuite de l’anticoagulation pendant 48 heures après la revascularisation n’apportait pas de bénéfice.(7)
Références
1. Byme RA., et al. 2023 ESC Guidelines for the management of acute coronary syndromes: Developed by the task force on the management of acute coronary syndromes of the European Society of Cardiology (ESC). 7 October 2023, European Heart Journal, 44(38): 3720–3826.
2. Gorog DA, Ferreiro JL, Ahrens I, et al. De-escalation or abbreviation of dual antiplatelet therapy in acute coronary syndromes and percutaneous coronary intervention: a Consensus Statement from an international expert panel on coronary thrombosis. Nat Rev Cardiol. 2023 Dec;20(12):830-844.
3. Tarantini G., et al. Early Discontinuation of Aspirin after PCI in Low-Risk Acute Myocardial Infarction. N Engl J Med. 2025 Nov 27;393(21):2083-2094
4. Guimaes PO., et al. Early Withdrawal of Aspirin after PCI in Acute Coronary Syndromes. 31 August 2025, N Engl J Med 2025;393:2095-2106.
5. ClinicalTrials.gov ID : NCT04957719
6. Van’t Hof A. et al. Zalunfiban at First Medical Contact for ST-Elevation Myocardial Infarction. November 10, 2025, NEJM Evidence.
7. Yan Y, et al. Postprocedural Anticoagulation After Primary Percutaneous Coronary Intervention for ST-Segment-Elevation Myocardial Infarction: A Multicenter, Randomized, Double-Blind Trial. Circulation. 2024 Apr 16;149(16):1258-1267.
Conclusion
Bien que les recommandations européennes préconisent encore une bithérapie antiagrégante pendant un an après un SCA, les essais récents montrent qu’une désescalade précoce du traitement est réalisable, sans majoration du risque ischémique.
De nouvelles perspectives de traitement sont également à l’étude. Une modification du paradigme actuel sera probablement bientôt envisagée notamment dans les nouvelles recommandations ESC du SCA attendues en 2027.




