La troponine cardiaque associée à un risque accru d'infarctus, chez les patients atteints d'une maladie coronarienne stable

WASHINGTON, 23 août 2023 (APMnews) - Chez les patients atteints d'une pathologie coronarienne chronique, une concentration plus élevée en troponine cardiaque a été associée à un risque accru d'infarctus du myocarde et de décès cardiovasculaire à moyen terme, selon une étude écossaise publiée dans le Journal of the American College of Cardiology (JACC).
Si la mesure de la concentration de la troponine cardiaque est utilisée pour stratifier le risque chez les patients présentant un syndrome coronaire aigu, l'intérêt de tester les patients dans d'autres situations reste peu clair. Des travaux ont montré que plus de la moitié des infarctus du myocarde surviennent chez des patients sans maladie coronarienne obstructive pré-existante et il n'existe aucune stratégie applicable à tous les patients coronariens pour quantifier ce risque et aider au traitement.
Ryan Wereski de l'université d'Edimbourg et ses collègues ont souhaité savoir si la mesure de la troponine cardiaque pourrait améliorer la stratification du risque chez les patients atteints d'une pathologie coronarienne chronique, indépendamment de la sévérité de la maladie et de l'évaluation des risques classique.
Ils ont utilisé la cohorte MICA (Myocardial Injury in patients referred for Coronary Angiography), composée de patients présentant des symptômes évocateurs d'un angor stable nécessitant une angiographie ambulatoire. La troponine cardiaque était mesurée en amont de l'angiographie et les médecins (dont le cardiologue référent) restaient aveugles à ces résultats.
Les seuils de référence (99e percentile) pour la troponine cardiaque étaient de 34 ng/l pour les hommes et 16 ng/l pour les femmes.
Le critère principal était composite et incluait l'infarctus du myocarde et la mort cardiovasculaire au cours du suivi (2,4 ans en moyenne).
Parmi les 4.240 patients inclus dans l'étude (âgés en médiane de 66 ans, 33% de femmes), 91,7% des patients présentaient une maladie coronaire. Parmi eux, un tiers (32,2%) avait une maladie non obstructive. Pour les deux tiers restants (67,8%), la maladie était obstructive, c'est-à-dire qu'au moins une artère épicardique présentait une sténose d'au moins 70% ou que le tronc commun coronaire gauche était obstrué à au moins 50%.
Globalement, la concentration de la troponine cardiaque était faible chez la grande majorité des patients, toutefois elle restait plus élevée chez les patients atteints d'une maladie coronaire (3,4 ng/l) que chez les patients exempts de cette maladie (1,9 ng/l). Plus précisément, chez près des deux tiers des patients coronariens (64,5%), la concentration en troponine cardiaque était jugée faible et chez un tiers (31,3%) intermédiaire. Seule une minorité d'entre eux (4,2%) dépassait les seuils de référence.
Au cours du suivi, 4,3% des patients ont présenté un infarctus du myocarde et 2,1% sont décédés d'une maladie cardiovasculaire. Globalement, 6% des patients ont atteint le critère principal mais ils étaient 6,4% chez les patients présentant une maladie coronaire chronique, contre 1,7% chez les patients non atteints. Chez les patients coronariens touchés, la concentration en troponine cardiaque était deux fois plus élevée que chez les patients n'ayant rapporté ni infarctus ni décès (6,7 ng/l contre 3,3 ng/l).
Le risque semble également progresser avec la concentration en troponine cardiaque. Ainsi, chez les patients coronariens, le taux d'incidence du critère principal était plus élevé chez les patients qui présentaient des concentrations au-dessus du seuil de référence (6,13 évènements pour 100 patients-années), en comparaison de ceux qui avaient une concentration intermédiaire (4,64 évènements) ou faible (1,58 évènement). Les patients présentant une concentration en troponine cardiaque en deçà du seuil de détectabilité (28% des patients) avaient même cinq fois moins de risque d'atteindre le critère principal que ceux qui étaient au-dessus du seuil de référence (2,8% contre 13,4%).
Après ajustement sur l'âge, le sexe et les facteurs de risque cardiovasculaire, la concentration en troponine cardiaque restait un prédicteur indépendant d'infarctus du myocarde et de décès cardiovasculaire.
Les auteurs ont également cherché à savoir quel seuil pouvait prédire une augmentation du risque. Ils écrivent ainsi que comparé aux patients dont la concentration en troponine cardiaque est en dessous de 5 ng/l, le risque d'infarctus du myocarde ou de décès cardiovasculaire est 1,5 fois plus élevé à des concentrations en troponine cardiaque supérieures à 10 ng/l.
Les auteurs concluent que la concentration en troponine cardiaque est associée au risque d'infarctus du myocarde et de décès cardiovasculaire après ajustement sur les facteurs de risque cardiovasculaires et la sévérité de l'atteinte coronaire (HR ajusté de 2,3). Une concentration en troponine supérieure à 10 ng/l confère un risque d'infarctus du myocarde ou de décès cardiovasculaire augmenté de 50%. D'autres études seront nécessaires afin d'évaluer si la mesure en routine de la troponine cardiaque peut être utile dans la sélection des patients à haut risque pour l'intensification de leur traitement.
(JACC, 8 août, vol.82, n°6, p473-485)
Source: APMnews
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