Insuffisance cardiaque : les défibrillateurs encore utiles ?
WASHINGTON, 6 juillet 2017 (APMnews) - L'amélioration des traitements médicamenteux de l'insuffisance cardiaque depuis 20 ans a permis de diviser de près de moitié le risque de mort subite, ce qui conduit à s'interroger sur le bénéfice que peut encore apporter aujourd'hui l'implantation d'un défibrillateur, estiment les auteurs d'une analyse publiée dans le New England Journal of Medicine (NEJM) jeudi.
De nombreux patients souffrant d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite décèdent subitement. Mais les traitements recommandés -bloqueurs du système rénine-angiotensine, bêta-bloquants, antagonistes du récepteur des minéralocorticoïdes et, plus récemment, valsartan-sacubitril (Entresto*, Novartis)- diminuent le risque de mort subite.
Moins le risque de mort subite est élevé, moins les défibrillateurs implantables, dont le rôle est de stopper les fibrillations ventriculaires et empêcher les arrêts cardiaques, conservent un intérêt. Li Shen de l'université de Glasgow (Royaume-Uni) et ses collègues se sont penchés sur cette question.
Ils se sont intéressés précisément au risque de mort subite dans 12 essais sur des traitements médicamenteux de l'insuffisance cardiaque répartis sur une période allant de mars 1995 (début de l'essai le plus ancien inclus, RALES) à mars 2014 (fin de l'essai le plus récent, PARADIGM-HF). Au total, 40.195 patients ont été étudiés (aucun n'avait de défibrillateur implanté lors de l'inclusion).
Les chercheurs ont constaté que, globalement, le risque de mort subite a diminué de 44% entre la première et la dernière étude. Le risque annuel est passé de 6,5% à 3,3%.
Cette diminution du risque "suggère qu'il pourrait être difficile de montrer un bénéfice significatif de l'implantation d'un défibrillateur en prévention primaire chez la majorité des patients ayant une insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite, dans la période actuelle", commentent les auteurs.
Ils citent en exemple l'étude DANISH, publiée en 2016, dans laquelle il n'a pas été montré de baisse de mortalité, chez des patients dont le traitement pharmacologique était optimal.
Il s'agissait toutefois du sous-groupe de patients dont l'insuffisance cardiaque à fraction d'éjection diminuée était d'origine non-ischémique. Il pourrait rester des patients ayant une maladie d'origine ischémique avec une cicatrice myocardique, facteur de dysrythmie, qui continueraient à être à haut risque et donc à bénéficier du défibrillateur implantable.
Il y a donc un besoin de critères clairs de pronostic qui permettraient d'identifier les patients continuant à être à haut risque.
Par ailleurs, les auteurs estiment que le délai de 3 mois après le début d'un traitement pharmacologique pour décider de l'implantation d'un défibrillateur est trop court. Avec les multiples traitements actuels, il faut 6 à 12 mois avant que tous les médicaments aient été correctement titrés puis que le remodelage inverse du ventricule soit terminé, et ce n'est qu'à ce moment qu'on peut décider si oui ou non il faut un défibrillateur.
(NEJM, 6 juillet, vol.377, n°1, p41-51)
0 commentaire — Identifiez-vous pour laisser un commentaire