La stratification et la prise en charge du risque rythmique de mort subite

Pr Patricia Réant
Service de Cardiologie-valvulopathie
CHU de Bordeaux
Le risque de mort subite en cas de CMH chez l’adulte est de 1 % par an en moyenne. Il convient de l’évaluer et de le réévaluer régulièrement chez tous les patients.
Bien sûr, en cas de mort subite récupérée, de FV ou de TV soutenue symptomatique, l’indication d’un DAI en prévention secondaire est d’emblée posée. Pour les autres patients, il convient de stratifier le risque et de discuter l’indication du DAI en prévention primaire en fonction du risque estimé.
Pour cela, il est nécessaire de s’appuyer sur l’existence de critères ayant démontré un lien associé, et sur leur cumul :
- antécédents familiaux de mort subite, surtout au premier degré (sujet de moins de 40-50 ans sans CMH connue ou patient plus âgé mais avec une CMH connue) ;
- antécédents de syncope récente (surtout si datant de moins de 5 ans) inexpliquée (surtout si elle est survenue à l’effort et sans prodromes) ;
- sévérité de l’hypertrophie (épaisseur de paroi VG proche de 30 mm) ;
- tachycardie ventriculaire non-soutenue (TVNS), surtout si elle est rapide et qu’elle se répète, y compris après traitement bétabloquant instauré et titré à la dose maximale tolérée.
La discussion de l’indication d’implantation de DAI doit être idéalement réalisée de manière collégiale, par une Heart team CMH, et une réévaluation au cours du temps du risque est à faire régulièrement, en cas de nouveau critère chez le patient notamment.
Les recommandations européennes de 2014 sont les premières à avoir proposé un score de risque reposant sur des variables continues (et non de manière binaire) et incluant l’âge du patient. En cas de risque de mort subite estimé à 5 ans ≥ 4 %, le DAI doit être discuté en prévention primaire, en cas de risque ≥ 6%, le DAI est généralement recommandé1.
Ce score est applicable chez les sujets âgés de 18 à 80 ans, qui n’ont pas eu de réduction septale thérapeutique, qui ont une CMH supposée sarcomérique, et n’est pas applicable en cas de CMH apicale.
Parmi les critères du SCD risk score de l’ESC, il y a l’âge, la TVNS (définie par > 3 ESV consécutives à > 120 bpm, l’épaisseur VG maximale, l’histoire familiale de mort subite, la syncope inexpliquée, le diamètre antéro-postérieur de l’oreillette gauche et l’obstruction intra-VG maximale provocable (au Valsalva, et non celle obtenue à l’effort)
Depuis les recommandations américaines de 2020, d’autres critères ont pris du poids également dans la discussion :
- la présence d’une fibrose extensive (≥ 15 % de la masse VG en IRM cardiaque) ;
- la présence d’un anévrysme apical VG ;
- une FEVG < 50 %.
Ces nouvelles recommandations réduisent par ailleurs l’importance du poids des critères classiques chez les patients âgés de plus de 60 ans.
Il existe également des études en faveur d’un effet délétère de certaines mutations génétiques (troponines (TNNT2 et TNNI3), MYL2) et de la présence de plusieurs mutations génétiques chez le patient.
Chez l’enfant, l’évaluation du risque rythmique ventriculaire est plus empirique, mais les hypertrophies majeures > 30 mm ou Zscore > 6, et l’histoire familiale de mort subite, sont des facteurs qui permettent de guider les indications de DAI en pratique.
Références :
- Elliott PM et al. 2014 ESC Guidelines on diagnosis and management of hypertrophic cardiomyopathy. The Task Force for the Diagnosis and Management of Hypertrophic Cardiomyopathy of the European Society of Cardiology (ESC) Eur Heart J. 2014
- Ommen SR. et al. 2020 AHA/ACC Guideline for the Diagnosis and Treatment of Patients With Hypertrophic Cardiomyopathy: Executive Summary: A Report of the American College of Cardiology/American Heart Association Joint Committee on Clinical Practice Guidelines. J Am Coll Cardiol. 2020;76:3022-3055.
Retrouvez l'intégralité du dossier spécial "Les cardiomyopathies hypertrophiques"
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