Recommandations ESC 2020 : du screening à l’ablation, une nouvelle prise en charge globale de la fibrillation atriale

Mis à jour le mardi 1 septembre 2020
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Elsa Beard

Auteur :
Elsa Beard
Membre du Collège des Cardiologues en Formation, Poitiers.

Relecture : Professeur Christophe Leclercq, Paris

En direct de l'ESC Congress 2020

Depuis 2016, les guidelines ESC se sont enrichies de près de 500 références bibliographiques, témoignant du progrès dans la connaissance, la compréhension ainsi que la prise en charge de la fibrillation atriale. Ces recommandations sont marquées par trois points principaux que sont : l’intérêt d’un screening systématique, l’importance d’une approche globale et la place de plus en plus prépondérante des procédures ablatives dans la prise en charge thérapeutique.

Un screening systématique

Il existe un réel intérêt du dépistage des patients de la fibrillation atriale chez les patients asymptomatiques en raison d’une mortalité et d’un risque d’accident vasculaire cérébral plus élevé comparativement aux patients symptomatiques.

Le dépistage systématique d’une fibrillation atriale est de ce fait désormais recommandé chez les patients asymptomatiques de plus de 65 ans (Classe IB).

Il existe à ce jour plusieurs dispositifs connectés à même de détecter une arythmie supra-ventriculaire avec une bonne sensibilité et spécificité. Il est cependant nécessaire que le tracé soit analysé par un médecin spécialiste avant de poser un diagnostic de fibrillation atriale.

Le diagnostic de fibrillation atriale repose par ailleurs sur la détection d’un rythme non sinusal, sans onde P individualisable, avec un espace R-R irrégulier sur une seule dérivation durant au moins 30 secondes ou sur un ECG 12 dérivations (Classe IB).

Une nouvelle approche globale : « ABC pathway »

  • « A » - Anticoagulation/Avoid stroke
    • Première étape : identifier les patients à faible risque (CHA2DS2-VASc 0 chez l’homme et 1 chez la femme) pour lesquels une anticoagulation curative n’est pas recommandée (Classe IA).
    • Deuxième étape : identifier les patients pour lesquels une anticoagulation curative est recommandée (CHA2DS2-VASc 2 chez l’homme et 3 chez la femme) ou doit être considérée (CHA2DS2-VASc 1 chez l’homme et 2 chez la femme) en prenant en compte le risque hémorragique selon le score HAS-BLED (Classe IB).
    • Troisième étape : initier une anticoagulation curative par AOD, recommandée en première intention en l’absence de contre-indication (Classe IA).
  • « B » - Better symptom control

Contrôle de la fréquence cardiaque

L’objectif de fréquence cardiaque au repos est inférieur à 110 bpm (Classe IIa B).

Il est recommandé de :

  • Privilégier en première intention une monothérapie par :
    • Bétabloquant ou inhibiteur calcique non dihydropyridinique en cas de FEVG préservée (Classe IB).
    • Bétabloquant ou digoxine en cas de FEVG inférieure altérée (Classe IB).
  • Instaurer une bithérapie en seconde intention.
  • Envisager une trithérapie ou une ablation du nœud atrio-ventriculaire en troisième intention (Classe IIa B).

L’objectif principal est l’amélioration des symptômes et de la qualité de vie (Classe IA).

Concernant la cardioversion :

  • Les molécules à privilégier pour une cardioversion médicamenteuse sont la FLECAINE, le VERNAKALANT (non disponible en France) et la PROPAFENONE (Classe IA). La CORDARONE étant réservée aux patients présentant une insuffisance cardiaque ou une cardiopathie structurelle et pour lesquels une cardioversion immédiate n’est pas nécessaire (Classe IA).
  • En cas de cardioversion, la durée minimale d’une anticoagulation curative est de 4 semaines, à poursuivre au long cours selon le score CHA2D2-VASc (Classe IIa B). Cette dernière devient désormais optionnelle si la cardioversion est réalisée dans les 24 heures suivant le début de la fibrillation atriale (Classe IIb C).

Concernant le traitement anti-arythmique au long cours :

  • Il est recommandé de privilégier en première intention et en l’absence de contre-indication un anti-arythmique autre que la CORDARONE en raison de sa toxicité extracardiaque (Classe IA) : FLECAINE, PROPAFENONE, DRONEDARONE (non disponible en France) ou SOTALOL.
  • En cas de traitement au long cours par FLECAINE, l’association à un bloqueur du nœud atrio-ventriculaire doit être envisagée (Classe IIa C).
  • « C » - Cardiovascular risk factors and concomitant diseases: detection and management

La correction des facteurs de risque cardio-vasculaire et la prise en charge des comorbidités font partie intégrante du traitement de la fibrillation atriale (Classe IB).

La recherche systématique d’une fibrillation atriale chez un patient asymptomatique hypertendu (Classe IB) ou atteint d’un syndrome d’apnée du sommeil est recommandée (Classe IIa C).

Une place prépondérante des procédures ablatives

L’ablation par isolation des veines pulmonaires est désormais recommandée après un premier échec ou une intolérance au traitement anti-arythmique chez les patients présentant une fibrillation atriale paroxystique ou persistante (Classe IA).

Elle peut être par ailleurs à considérer en première intention en cas de fibrillation atriale paroxystique (Classe IIa B) ou persistante en l’absence de facteur de risque majeur de récidive (Classe IIb C).

L’ablation par isolation des veines pulmonaires est recommandée en première intention chez les patients présentant un tableau de cardiopathie rythmique (Classe IB). Elle peut être envisagée chez les patients présentant une insuffisance cardiaque à fraction d’éjection altérée afin de diminuer la mortalité et le taux d’hospitalisation pour décompensation cardiaque (Classe IIa B).

Des procédures ablatives répétées peuvent être envisagées en cas de récidive de fibrillation atriale symptomatique chez un patient ayant présenté une amélioration significative de sa qualité de vie au décours de la précédente ablation (Classe IIa B).

Situations spécifiques

  • Angioplastie coronaire : la durée de la triple thérapie est d’une semaine en cas de risque hémorragique élevé et d’un mois en cas de risque ischémique prépondérant. L’association d’un anti-P2Y12 avec une anticoagulation curative est poursuivie pour une durée d’un an dans les syndromes coronariens aigus et de six mois dans les syndromes coronariens chroniques (Classe IB).
  • Insuffisance cardiaque : la fréquence cardiaque optimale visée doit être inférieure à 100-110 bpm.
  • Sténose mitrale modérée à sévère ou prothèse valvulaire mécanique : anticoagulation curative par AVK uniquement et contre-indication absolue des anticoagulants directs(NOACs) (Classes IIIC et IIIB).
  • Prévention en vue d’une chirurgie cardiaque : administration péri-opératoire de bétabloquant ou CORDARONE (Classe IA).

Les principales modification par rapport aux recommandations de 2016

Pour en savoir plus, consultez :

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