Pronostic des syndromes coronaires chroniques : un syndrome, plusieurs pronostics

Publié le lundi 2 novembre 2020
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Jean-Philippe Collet

Jean-Philippe Collet1

Michel Zeitouni

Michel Zeitouni1

 

 

1 : Sorbonne Université Médecine - Unité de Soins Intensifs de Cardiologie, Institut de Cardiologie, Pitié-Salpêtrière, Paris

Bien que décrite comme stable, la maladie athérothrombotique est évolutive, marquée par de multiples récurrences ischémiques coronaires, cérébrales ou périphériques à l’origine de réhospitalisations multiples et d’une altération de la qualité de vie. La mortalité annuelle moyenne de 2 à 3% masque des réalités très différentes en fonction du type de maladie coronaire et du retentissement myocardique. L’atteinte coronaire pluritronculaire ou la dysfonction ventriculaire gauche associée sont associées à une mortalité annuelle de 20 à 30% et supérieure à 50% à 5 ans. En revanche, la dissection coronaire et l’atteinte microvasculaire (INOCA) ont un pronostic parmi les meilleurs, tout comme la maladie coronaire spastique.

Athérome coronaire stable et ischémie

La maladie coronaire dite symptomatique se manifestant par de l’angor ou une ischémie silencieuse dépistée par des tests non-invasifs font partie de la classe de risque dite intermédiaire, mais pouvant être reclassifée dans le haut risque en cas d’atteinte coronaire multitronculaire. Le registre d’angioplastie élective de la Pitié-Salpêtrière (n=1398) indiquait une mortalité annuelle post angioplastie de 1.5% et un taux d’infarctus du myocarde de 3.4% (2). L’étude ISCHEMIA (n=5179), conduite chez des patients avec ischémie modérée et sévère, démontre des chiffres superposables avec une mortalité de 1.7%, 4.3% et 9% à un, trois et cinq ans de suivi, respectivement (3). Le taux d’infarctus du myocarde était de 4.5% et 10% à 1 an et dix ans respectivement (Tableau 1). Ces chiffres en apparence bas sont retrouvés alors qu’un traitement médical optimal était mis en place et que la durée de suivi est limitée compte tenu à la fois de l’espérance de vie de ces patients et de l’histoire naturelle de cette maladie qui est beaucoup plus longue. L’angor spastique stable a un pronostic meilleur avec une mortalité de 7.5% à 10 ans et un taux d’infarctus de 1.4 % (4).

 

  Taux de Mortalité Taux d'IDM
Délai post randomisation dans ischemia Bras invasif Bras conservateur Bras invasif Bras conservateur
1 an 1.70% 1.00% 5.30% 3.80%
3 an 4.30% 4.30% 7.70% 8.50%
5 an 9.00% 8.30% 10.30% 11.90%

 

Tableau 1 : taux d’évènement dans ISCHEMIA trial

Maladie coronaire prématurée

La maladie coronaire prématurée définie par l’apparition d’une première manifestation coronaire avant 45 ou 55 ans, même stabilisée, a un pronostic péjoratif lorsque les facteurs de risque ne sont pas contrôlés (5,6). L’apparition d’un diabète (30% des patients à cinq ans), la persistance du tabac (50% des patients), un LDL cholestérol non dans la cible thérapeutique (50% des patients), une maladie inflammatoire associée (HIV, HVC, polyarthrite) sont à l’origine d’une forme d’athérothrombose agressive avec de multiples récidives. Dans la cohorte française AFIJI, ces patients présentent un taux de mortalité de 10 % sur un suivi médian de 8 ans, avec un nombre de récidives d’infarctus du myocarde et néo-lésion ischémiques supérieurs à 5 évènements par 100 patients-année. Plus d’un tiers de ces patients seront tritronculaires avant 55 ans. Une prise en charge précoce et sans relâche des facteurs de risques cardiovasculaires est l’enjeu majeur de cette maladie dès le diagnostic établi.

Références

  1. Knuuti J, Wijns W, Saraste A, et al. 2019 ESC Guidelines for the diagnosis and management of chronic coronary syndromes The Task Force for the diagnosis and management of chronic coronary syndromes of the European Society of Cardiology (ESC). Eur. Heart J. 2020;41:407–477.
  2. Zeitouni M, Silvain J, Guedeney P, et al. Periprocedural myocardial infarction and injury in elective coronary stenting. Eur. Heart J. 2018;39:1100–1109.
  3. Maron DJ, Hochman JS, Reynolds HR, et al. Initial Invasive or Conservative Strategy for Stable Coronary Disease. N. Engl. J. Med. 2020;382:1395–1407.
  4. Seitz A, Gardezy J, Pirozzolo G, et al. Long-Term Follow-Up in Patients With Stable Angina and Unobstructed Coronary Arteries Undergoing Intracoronary Acetylcholine Testing. JACC Cardiovasc. Interv. 2020;13:1865–1876.
  5. Collet J-P, Zeitouni M, Procopi N, et al. Long-Term Evolution of Premature Coronary Artery Disease. J. Am. Coll. Cardiol. 2019;74:1868–1878.
  6. Zeitouni M, Nanna MG, Sun J-L, Chiswell K, Peterson ED, Navar AM. Performance of Guideline Recommendations for Prevention of Myocardial Infarction in Young Adults. J. Am. Coll. Cardiol. 2020;76:653–664.

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