Dépistage de l’obstruction : quels tests en pratique ?

Mis à jour le mardi 28 février 2023
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Albert Hagège

Pr Albert Hagège
Chef du département de Cardiologie,
HEGP, Paris

L’obstruction (présence et importance) est très variable, parfois d’un jour à l’autre, voire d’un cycle cardiaque à l’autre, et susceptible d’apparaitre ou d'augmenter avec les manœuvres de provocation (Valsalva, effort, post-prandial, après ingestion d’alcool, orthostatisme), sous drogues (diurétiques, inotropes positifs, vasodilatateurs, sildénafil et apparentés), ou encore en cas de déshydratation.

Il est essentiel en écho 2D de différentier obstruction sous-aortique (due au SAM), obstruction médio-VG (souvent avec hypertrophie des piliers) et oblitération apicale systolique (sans signification hémodynamique). Des anomalies structurelles mitrales majeures (franche élongation des feuillets, insertion valvulaire directe de pilier) peuvent participer au SAM et compromettre l’efficacité des drogues et/ou de l’ablation septale (Figure 2). Si la signification hémodynamique de l’obstruction sous-aortique et médio-ventriculaire est la même, le distingo entre les deux ne peut se faire que par la visualisation en échographie 2D de la cinétique des structures cardiaques en systole (SAM dans le premier cas, sténose médio ventriculaire dans le second) ; l’obstruction médio-ventriculaire peut favoriser avec le temps l’apparition d’un anévrisme de l’apex ventriculaire dont on sait qu’il est à risque d’arythmies ventriculaires graves et de mort subite.

Figure 2 : écho 2D permettant de différencier anomalies structurelles mitrales majeures, obstruction médico-VG et oblitération apicale systolique

Il est recommandé (ESC 2014), dans les CMH symptomatiques avec obstruction basale < 50 mmHg, d’évaluer l’obstruction en échocardiographie-Doppler en utilisant successivement les tests de provocation suivants, jusqu’à obtention d’une obstruction ≥ 50 mmHg :

  1. Manoeuvre de Valsalva. Durant cette expiration forcée à glotte fermée, on peut voir apparaitre progressivement en Doppler continu une accélération des vitesses dans la chambre de chasse, contemporaine d’un SAM. L’enregistrement doit se faire durant la phase 2 de la manœuvre (phase dite de « strain », tenue pendant 10 sec, c’est à dire 5 à 15 secondes après le début du Valsalva) ; à ce moment-là, il y a conjointement chute de la pression artérielle, diminution du retour veineux et accélération de fréquence, tous concourant à la provocation du SAM. On peut contrôler son efficacité par la diminution de la vélocité de l’onde E transmitrale en Doppler pulsé. La manœuvre est faite d‘abord en position couchée ou semi-assise, puis (si négative) en position assise, voire debout. En cas d’échec, on peut effectuer une mesure après passage brutal de la position accroupie à la position debout.
  2. Manœuvre « squat to stand ». Le passage brutal de la position accroupie à la position debout, par la diminution brutale de précharge qu’elle entraîne, est parfois plus efficace que le Valsalva pour déclencher une obstruction.
  3. Épreuve d’effort. Effectuée sur cycloergomètre ou tapis roulant, les mesures se font au pic de l’effort (debout ou semi-couché) ou en post-effort (couché) immédiat (dans les 5 mn suivant l’effort), les 2 mesures étant assez bien corrélées. Les modalités de ce test de provocation dépendent des habitudes du centre et des équipements disponibles.
  4. En cas d’échec (obstruction provoquée <50 mmHg), notamment en cas de symptômes d’effort demeurant inexpliqués, il est proposé de répéter les tests après arrêt des ralentisseurs de la conduction atrio-ventriculaire, ou de changer de modalité d’effort (tapis roulant plutôt que bicyclette…).

De manière générale :

  1. La sensibilité de détection de l’obstruction (et son amplitude) est meilleure lorsque la mesure (ou l’effort) est réalisée en position verticale, donc meilleure sur tapis que sur bicyclette, debout que demi-assis ou couché.
  2. Il en est de même lorsque les tests sont effectués après un déjeuner frugal (l’échographie après un repas gras permettant de multiplier par 3 la sensibilité du test).
  3. Une manœuvre de Valsalva positive prédit très fiablement la présence d’une obstruction d’effort (# 100 %), mais lorsque la manœuvre est positive, le gradient d’effort est en règle beaucoup plus élevé que le gradient au Valsalva, tandis que plus de 40 % des patients avec manœuvre négative ont tout de même un gradient d’effort.

Références :

  1. Elliott PM, Anastasakis A, Borger MA, et al. 2014 ESC Guidelines on diagnosis and management of hypertrophic cardiomyopathy: the Task Force for the Diagnosis and Management of Hypertrophic Cardiomyopathy of the ESC. Eur Heart J 2014;35:2733-79.
  2. Ommen SR, Mital S, Burke MA, et al. 2020 AHA/ACC Guideline for the diagnosis and treatment of patients with hypertrophic cardiomyopathy: executive summary: A report of the American College of Cardiology/American Heart Association joint committee on clinical practice guidelines. J Am Coll Cardiol 2020;76(25):3022-3055.
  3. La Canna G, Scarfò I, Arendar I, Alati E, Caso I, Alfieri O. Phenotyping Left Ventricular Obstruction With Postprandial Re-Test Echocardiography in Hypertrophic Cardiomyopathy. Am J Cardiol. 2020;125(11):1688-1693

 

Retrouvez l'intégralité du dossier spécial "Les cardiomyopathies hypertrophiques"

 

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