MRUSMI post-PCI - Sonothrombolyse post-angioplastie chez les patients avec STEMI et no-reflow électrocardiographique

Mis à jour le lundi 11 décembre 2023
dans
Louis Perrard

Auteur :
Louis Perrard
Membre du Collège des Cardiologues en Formation,
Amiens

Antonin Trimaille

Relecteur : 
Antonin Trimaille
Membre du Collège des Cardiologues en Formation,
Strasbourg

En direct de l'ESC Congress 2023

D'après la présentation de Soufiane El Kadi (Amsterdam, Pays-Bas) : "MRUSMI post PCI: post PCI sonothrombolysis in STEMI patients with electrocardiographic no-reflow"

Les messages clés

  • Après angioplastie pour STEMI, le "no-reflow" est associé à l’obstruction microvasculaire et est un prédicteur de mortalité à court et long termes
  • L’essai MRUSMI a précédemment démontré que la sonothrombolyse en pré- et post-angioplastie pour STEMI permettait une diminution de la taille de l’infarctus et une amélioration de la fonction VG
  • L’objectif de cette étude était d’évaluer l’efficacité de la sonothrombolyse dans la population de patients avec STEMI et "no-reflow" post-angioplastie
  • Chez ces patients, la sono-thrombolyse post-angioplastie ne permet pas la réduction de l’obstruction microvasculaire, n’a pas d’effet sur la taille de l’infarctus, et n’améliore pas la fonction VG

Introduction

Malgré un succès de la revascularisation par angioplastie lors d’un syndrome coronaire aigu avec sus-décalage du segment ST (STEMI), 50 % des patients souffrent d’obstruction microvasculaire (OMV). L’OMV est indépendamment associée à un remodelage ventriculaire gauche (VG) inverse, à l’insuffisance cardiaque et à la mortalité. La persistance d’un sus-décalage du segment ST est fortement corrélée avec l’OMV en IRM cardiaque et est un prédicteur de mortalité à court et long termes.

L’essai MRUSMI a démontré, après sonothrombolyse en pré- et post-angioplastie, une diminution de la taille de l’infarctus et une amélioration de la fonction VG.

L’objectif de cette étude est d’évaluer l’efficacité de la sonothrombolyse, uniquement réalisée en post-angioplastie, chez les patients atteints d’un STEMI avec "no-reflow" reflété par un sus-décalage du segment ST persistant après revascularisation.

Principe de l'étude, méthodologie et résultats

Il s’agit d’une étude néerlandaise, prospective, monocentrique, randomisée en 1:1, ouverte, ayant inclus des patients présentant un STEMI pris en charge en moins de 12h, avec sus-décalage du segment ST persistant à l’ECG 30 minutes après angioplastie, et randomisés dans le groupe expérimental (sonothrombolyse) ou dans le groupe témoin (contrôle).

Les critères d’exclusion étaient un antécédent de pontage aorto-coronaire, une hypersensibilité au produit de contraste échographique, et un état de choc cardiogénique.

En pratique, les patients recevaient une injection intra-veineuse de produit de contraste échographique (microbulles) puis bénéficiaient d’une échocardiographie transthoracique, avec des paramètres modifiés pour les patients du groupe test (impulsions intermittentes de haute énergie), versus le groupe contrôle (impulsions de basse énergie) (Figure 1).

Figure 1 : Méthodologie de l'étude MRUSMI

Les microbulles sont visualisées dans les cavités cardiaques 10 à 30 secondes après leur injection. Le faisceau échographique induit des oscillations des microbulles qui peuvent avoir, selon leur intensité, différents effets. À basse énergie, avec un index mécanique (IM) bas, les microbulles se déforment peu. Si la pression acoustique augmente (IM haut), les bulles se déforment de manière asynchrone et émettent des fréquences harmoniques et fondamentales. Ce phénomène de « cavitation des microbulles » entraine des forces de cisaillement capables de dissoudre le thrombus microvasculaire et de libérer de l’oxyde nitrique par les cellules sanguines endothéliales à l’origine d’une vasodilatation, favorisant le flux sanguin et la perfusion myocardique.

Le critère de jugement principal était la mesure électrocardiographique du sus-décalage du segment ST 60 min après la sonothrombolyse. Les critères de jugement secondaires étaient électrocardiographiques (élévation maximale du segment ST), échographiques (score de perfusion myocardique), biologique (pic de troponine), l’IRM à 6-8 semaines qui permettait d’apprécier la présence de fibrose myocardique, la taille de l’infarctus et la FEVG, et cliniques avec les événements cardiovasculaires majeurs (MACE) à 6 mois (mortalité toutes causes, hospitalisation pour insuffisance cardiaque, revascularisation de l’artère coupable).

Au total, 67 patients ont été inclus dans l’étude : 35 dans le groupe sonothrombolyse et 32 dans le groupe contrôle. Il s’agissait principalement d’hommes (> 80 %), avec une proportion plus importante dans le groupe sonothrombolyse que dans le groupe contrôle de diabète (23 % vs 6 %), de dyslipidémie (30 % vs 19 %) et moins importante d’HTA (17 % vs 38 %). Les patients étaient pris en charge rapidement (temps entre le début des symptômes et le diagnostic < 90 min, temps pour reperfusion de 50 min). L’artère coupable était le plus souvent l’artère interventriculaire antérieure (> 70 %). La procédure permettait un bon résultat angiographique final dans la majorité des cas (environ 70 % de flux TIMI 3 au décours de l’angioplastie).

L’analyse statistique du critère de jugement principal n’a pas retrouvé de différence significative entre les 2 groupes, avec un sus-décalage du segment ST à 5,4 ± 3,0 mm dans le groupe sonothrombolyse et de 6,0 ± 3,6 mm dans le groupe témoin (p = 0,50) (Figure 2).

Figure 2 : Résultats sur le critère de jugement principal (mesure du sus-décalage du segment ST post-angioplastie) 

Concernant les critères de jugement secondaires, aucune différence significative entre les 2 groupes n’a été observée. En particulier, il n’y a eu aucune différence sur le pic de troponine, la taille de l’infarctus à l’IRM ou encore la FEVG. De même, aucune différence en termes d’événements cliniques au cours du suivi à 6 mois n’a été décelé, mais le nombre d’événements était faible.

À noter : une méthodologie respectée avec une inclusion du nombre de patients prévu, un bon suivi clinique à 6 mois avec absence de perdus de vue (même si moins de 10 % des patients n’ont pas bénéficié de l’IRM cardiaque), ainsi qu’un faible taux de mortalité dans cette population à très haut risque (1 patient décédé dans chaque groupe au terme du suivi), sans sur-risque dans le groupe expérimental.

Conclusion

Chez les patients présentant un STEMI avec "no-reflow" électrocardiographique (persistance du sus-décalage du segment ST 60 minutes après l’angioplastie), la sonothrombolyse post-angioplastie n’a pas démontré d’effet bénéfique sur l’obstruction microvasculaire, la taille de l’infarctus, la fonction ventriculaire gauche et les évènements cliniques. 

Pour aller plus loin

L’essai princeps MRUSMI avait démontré que la sonothrombolyse pré- et post-angioplastie améliorait les taux de recanalisation coronaire, la taille de l’infarctus et la fonction systolique VG chez les patients avec STEMI traités par angioplastie primaire. Dans la population spécifique de patients avec "no-reflow" post-revascularisation, cette technique appliquée après l’angioplastie ne semble pas améliorer significativement la perfusion myocardique.

D’autres études seront nécessaires pour améliorer la prise en charge du "no-reflow" post-angioplastie, qui impacte significativement le pronostic, malgré une revascularisation épicardique optimale.

 

Pour en savoir plus, consultez les LBS, LBT et hotlines complètes, en langue anglaise, présentées lors de l'ESC 2023 :

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