Dossier spécial : Les ARN interférents et les amyloses à transthyrétine

Pr Thibaud Damy
Hôpitaux Universitaires Henri Mondor,
Créteil
Les ARNs interférents sont de petites molécules qui vont interférer avec nos ARN messagers et bloquer la production de protéine. Les amyloses à transthyretine (ATTR) sont consécutives à la formation de fibrilles amyloïdes à partir de la proteine de transthyrétine. Elle peut être héréditaire et, dans ce cas, c'est une mutation génétique du gêne de la transthyrétine qui conduit à la formation d'une protéine anormale, qui va destabiliser le tétramère de transthyrétine et aboutir à la fibrilloformation ,ou elle peut être sauvage, liée à l'âge, et, dans ce contexte, la proteine de transthyrétine est normale.
Les ARN interférents sont en développement dans beaucoup de pathologies. Au fur et mesure, ils évoluent pour cibler l'organe de la production principale de la protéine pathologique (le foie dans l'amylose ATTR) , allonger leur mécanisme d'action et modifier le site d'injection (intraveineuse à sous-cutanée), réduisant ainsi le nombre d'injection à 4 par an.
Jean Sébastien Hulot nous explique ici, de manière très didactique, le développement de ces molécules. Dans les amyloses ATTR, les premiers essais ont été réalisés dans les amyloses héréditaires à transthyrétine à forme neurologique. Vincent Algalarrondo nous décrit ici les résultats des essais qui ont permis à ces molécules d'obtenir l'AMM dans les polyneuropathies des ATTR héréditaires neurologiques. Enfin, Silvia Oghina nous dévoile les derniers résultats de l'utilisation des différentes générations des ARNs interfèrents dans les amyloses cardiaques à transthyrétine héréditaires et sauvages, non sans rebondissements.
Nous vivons un temps mémorable, où une maladie méconnue il y a 10 ans en cardiologie, bénéficie d'innovations technologiques inégalées, donnant ainsi beaucoup d'espoir aux patients et soignants qui combattent cette maladie au pronostic sombre. Réjouissons-nous de l'arrivée de tous ces traitements, mais rappelons-nous que seuls les patients qui seront diagnostiqués pourront en bénéficier !
Bonne lecture et bon diagnostic !
Le mécanisme des siRNA, qu'en attendre?
Les traitements par ARN interférents ont récemment fait leur entrée dans l’arsenal thérapeutique des cardiologues, et leurs indications progressent.
Ces nouveaux traitements exploitent les principes de la synthèse des protéines à partir du code génétique, en venant interférer dans l’un des processus finaux, le passage d’un ARN messager cible à une protéine.
Les grands essais des siRNA dans l'amylose et le bénéfice neurologique dans l'amylose à transthyrétine héréditaire
Après de premiers articles publiés sur l’efficacité biologique des siRNA pour inhiber la synthèse de la TTR dans l’amylose héréditaire à TTR, la preuve de l’efficacité du patisiran allait être démontrée dans l’étude Appolo qui a été publiée dans le Nejm en juillet 2018.
De manière notable, la moitié des patients inclus dans l’essai (56%) présentaient un phénotype mixte d’amylose à TTR avec une atteinte cardiaque associée. Un certain nombre d’analyses cardiologiques avaient donc été pré-spécifiées lors de l’essai sur cette population.
Les siRNA et le coeur
Le tafamidis, stabilisateur du tétramère de transthyrétine, est à ce jour le seul traitement ayant une autorisation de mise sur le marché pour le traitement de la cardiopathie amyloïde à TTR (sauvage ou héréditaire) du fait de son effet sur la réduction de la mortalité et des réhospitalisations de cause cardiovasculaire à 30 mois.
Toutefois, d’autres études sont en cours pour évaluer l’efficacité et la sécurité d’ARN interférant (siRNA) et d’oligonucléotides antisens (ASO), ayant prouvé leur efficacité dans les neuropathies amyloïdes à TTR, qui inhibent la synthèse hépatique de TTR et dont le mécanisme d’action, très intéressant, inhibe directement la production de transthyrétine.
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